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L'équipe a fait un partenariat avec Nestlé qui a commercialisé un produit basé sur leurs recherches appelé BrainXpert. Photo : CIUSSS de l'Estrie - CHUS

Un carburant alternatif pour le cerveau

Une équipe du Centre de recherche sur le vieillissement du CIUSSS de l’Estrie a découvert que les personnes souffrant de troubles cognitifs légers peuvent améliorer leur capacité cérébrale grâce à l’apport de suppléments alimentaires qui facilitent la génération de cétones. Quartier Libre s’est entretenu avec le professeur au Département de médecine de l’Université de Sherbrooke et directeur du projet, Stephen Cunnane, pour en savoir plus sur les résultats de sa recherche.

Quartier Libre : Que sont les cétones et comment affectent-elles notre cerveau ?

Stephen Cunnane : C’est une petite molécule produite par notre corps lorsqu’il transforme les acides gras présents dans les huiles que l’on consomme. Elles sont utilisées par notre cerveau comme carburant alternatif au glucose. Si nous mangeons trois repas par jour, notre cerveau carbure presque exclusivement au glucose durant la journée et nous utiliserons plutôt les cétones la nuit. Nous allons également produire des cétones si nous jeunons ou si nous suivons une diète dite cétogène, parce qu’elle est très faible en glucides.

Q.L.: Comment les cétones améliorent-elles les fonctions cognitives ?

S.C.: Le glucose est le carburant principal du cerveau et fournit normalement jusqu’à 90 % de l’énergie qu’il consomme. Depuis une trentaine d’années, nous savons que le cerveau, dans le cadre de la maladie d’Alzheimer, a de la difficulté à utiliser le glucose. Grâce à nos recherches, nous avons réalisé que les cellules affectées par la maladie sont capables d’utiliser très facilement les cétones comme carburant de remplacement.

Q.L.: Quels sont les effets de l’apport énergétique des cétones sur les personnes souffrant de troubles cognitifs ?

S.C.: Nous avons déterminé qu’il y a une corrélation directe entre la cognition et l’apport en cétone chez les personnes souffrant de troubles cognitifs légers, qui marquent le début de la maladie d’Alzheimer. Nous ne savons pas si cet apport peut aussi ralentir la progression de la maladie. C’est possible, mais puisque c’est une maladie qui se déploie très lentement, il faudra faire des études sur le long terme et avec beaucoup de participants pour le savoir. Nous espérons pouvoir faire ce type d’études dans le futur, mais elles coûtent plusieurs millions de dollars à produire et elles vont dépendre des subventions.

Q.L.: Est-ce qu’un plus grand apport en cétones peut avoir un effet positif sur un cerveau sain ou est-ce qu’elles peuvent seulement aider les personnes avec des problèmes cognitifs ?

S.C.: Les personnes âgées ont une moins bonne capacité de captage de glucose au cerveau que celles de 30 ans. Même si ces personnes n’ont pas de problèmes de cognition, le danger de tomber en dessous du seuil minimal pour fonctionner normalement reste présent. Un meilleur apport en cétones pourrait donc aider à garder le cerveau à un niveau de fonctionnement normal chez les personnes qui n’ont pas de symptômes. Toutefois, l’activité physique reste la meilleure façon d’intervenir pour retarder le déclin cognitif. Les suppléments viennent simplement ajouter un effet positif de plus.

Q.L.: Comment avez-vous fait pour augmenter l’apport en cétones au cerveau des participants à votre étude ?

S.C.: Normalement, pour avoir plus de cétones, on doit jeuner pendant une période prolongée, ce qui n’est pas vraiment une solution. Sinon, on peut utiliser une diète cétogène, mais il faut être extrêmement discipliné pour qu’elle fasse effet. Notre approche a donc été de laisser les personnes âgées se nourrir selon leurs habitudes et de leur apporter des suppléments de triglycérides à chaines moyennes (TCM). Ce supplément alimentaire, fait à partir d’huile de noix de coco, est le meilleur moyen d’amener le corps à produire des cétones sans aller sur la diète, mais il peut donner des maux de ventre si l’on en prend trop.

Q.L.: Le produit que vous avez utilisé dans votre étude est-il disponible pour le grand public ?

S.C.: Nous avons fait un partenariat avec Nestlé, qui a commercialisé un produit basé sur nos recherches, appelé BrainXpert. Celui-ci est disponible dans certains pays d’Europe, mais il n’est pas encore homologué au Canada. Cependant, le TCM est disponible dans des boutiques d’aliments naturels et les patients peuvent se faire leurs propres concoctions s’ils le désirent.

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