Le professeur émérite en criminologie de l’UdeM Serge Brochu a rappelé les objectifs de la légalisation du cannabis lors
d’une conférence organisée par le Centre international de criminologie comparée, le 17 octobre dernier. « Protéger la santé et la sécurité publique en contôlant la qualité des produits, empêcher les profits des réseaux criminels et garder le cannabis hors de portée des jeunes », énumère-t-il. Si, selon lui, une année est trop courte pour pouvoir parler des retombées, il est néanmoins possible d’identifier certaines tendances.
Une hausse peu significative de la consommation
La consommation a légèrement augmenté, selon l’expert. « On est passé de 14 % à 18 % d’usagers dans l’ensemble du Canada, et de 10,4 % à 11 % au Québec1 », explique-t-il. Il estime que cette hausse résulte de l’engouement suscité par la légalisation. Elle serait aussi accentuée par le fait que les personnes interrogées peuvent maintenant déclarer ouvertement qu’elles consomment du cannabis. M. Brochu précise que la consommation n’a pas augmenté chez les jeunes âgés de 15 à 17 ans2, un bilan qui ne reflète pas les inquiétudes exprimées avant la légalisation. « On pensait que tout le monde serait intoxiqué », ironise le professeur.
Cette année de légalisation du cannabis est restée sans effets notoires sur la consommation au sein du campus de l’UdeM. « Depuis la légalisation, le secrétariat général n’a traité aucun dossier disciplinaire sur le sujet, déclare la porte-parole de l’UdeM, Geneviève O’Meara. Du côté des agents de la sûreté, il y a eu moins d’interventions liées au cannabis dans la dernière année. » Elle précise qu’aucune intervention policière en lien avec le cannabis ni aucune saisie ni expulsion n’a eu lieu dans l’année qui s’est écoulée.
Répondre aux objectifs
En ce qui concerne les mesures de santé publique, des programmes de prévention ont été mis en place pour les étudiants de l’UdeM. « Au même titre que la consommation d’alcool, la consommation de cannabis fait maintenant partie des formations existantes que la Direction de la prévention et de la sécurité donne aux associations étudiantes qui désirent organiser des événements sur le campus, indique Mme O’Meara. Le Centre de santé et de consultation psychologique a aussi lancé une campagne de prévention et de sensibilisation. »
Comme autre mesure de santé publique, l’UdeM ainsi que les autres universités interdisent la consommation au sein de leurs campus, ce que les différentes associations doivent faire respecter durant leurs événements. « La Loi encadrant le cannabis interdit la consommation de cannabis sur les terrains des établissements postsecondaires, rappelle la secrétaire générale de la FAÉCUM, Sandrine Desforges. Cette interdiction est d’ailleurs réitérée par le règlement sur le cannabis de l’UdeM. »
En plus de contrôler les produits, pour que les objectifs de santé et de sécurité soient remplis, il faudrait, selon M. Brochu, que le marché légal l’emporte sur le marché illégal, qui sévit toujours. Si Serge Brochu estime que le marché légal a connu une belle performance en réalisant 21 % des ventes sur un an3, il croit qu’il faudra plusieurs années avant que celui-ci ne monopolise le marché du cannabis. L’ouverture prochaine de nouvelles SQDC à Montréal devrait jouer un rôle favorable dans la conquête du marché.
Un étudiant de l’UdeM, Léonard*, reconnait qu’acheter du cannabis légalement le rassure, car de cette façon il sait ce qu’il fume.
* Nom changé, l’étudiant(e) préférant garder l’anonymat et ne souhaitant pas que son programme d’études soit mentionné.
1 – Statistique Canada – Rapports sur la santé : Analyse des tendances de la prévalence de la consommation de cannabis et des mesures connexes au Canada.
2 – Enquête nationale sur le cannabis 2018 trimestre 1 à 4, et 2019 trimestre 1.
3 – Statistique Canada : Intégration du marché du cannabis aux comptes économiques nationaux, quatrième trimestre de 2018.