Le service de consultation psychologique de l’UdeM est débordé. Il est vrai qu’avec 3 650 consultations supplémentaires en un an, ça peut se comprendre (p. 4-5). Concrètement, c’est une attente de 16 semaines pour les étudiants dont les cas sont jugés non urgents. Mais comment expliquer une hausse aussi importante ? Il y a des tas de raisons à cela, mais une a retenu mon attention.
Dépénaliser oui, sensibiliser aussi
La légalisation du cannabis a fait une entrée fracassante dans la province en octobre dernier. Les lieux de vente ont été pris d’assaut et les services ont été débordés par cette affluence. Un peu comme le service de consultation de l’UdeM, finalement.
En 2017, des chercheurs du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) mettaient en lumière la corrélation entre une consommation soutenue de cannabis et l’évolution de troubles psychotiques*.
Sans diaboliser le pot, il est évident qu’il n’est pas à mettre entre toutes les mains. Les personnes avec des prédispositions à la psychose sont, par exemple, plus à risque. « Il y a une sous- estimation, voire une banalisation de la dangerosité de la consommation du cannabis en matière de maladie mentale », soutenait la professeure du Département de psychiatrie de l’UdeM, Amal Abdel-Baki, auteure de l’étude à l’époque.
Alors oui, la légalisation est une avancée sociétale en matière de droits et libertés individuels, mais elle doit s’accompagner d’une sensibilisation aux problèmes que le cannabis peut engendrer. Il est temps de trouver des solutions pour éviter aux étudiants d’attendre plusieurs mois une consultation.
En comparaison, le fentanyl c’est la mort instantanée. Une étreinte soudaine qui choque par sa virulence. Pour mettre fin à l’hécatombe, des formations sont données par des associations ou dans certains cours universitaires (p. 11). Lorsque l’on fume du cannabis, la maladie mentale met plus de temps à se déclarer. Elle s’installe doucement, sur le long terme, mais n’en est pas moins dangereuse. Alors pourquoi n’offre-t-on pas de formations pour la contrer ?
Des efforts à faire
L’art pour exprimer son mal-être. Une solution parmi d’autres pour faire avancer la cause en évoquant les problèmes du quotidien par le biais de la poésie ou de la peinture par exemple (p. 6). Tous les moyens sont bons pour s’ouvrir à des problématiques qui restent taboues dans nos sociétés.
La maladie mentale, on veut bien l’évoquer avec son cercle (très) proche, mais pas question d’en parler publiquement. Aucun des étudiants interrogés dans l’article n’a souhaité dévoiler son identité. Sûrement par peur du jugement et de la stigmatisation. À la vue des chiffres évoqués en introduction, les étudiants ont plus facilement le réflexe de consulter, mais pas encore d’en parler ouvertement.
En effet, comme le martèle Robin Williams à un Matt Damon torturé dans une scène marquante du film Le Destin de Will Hunting : « Ce n’est pas de ta faute. » Il faut arrêter de se sentir coupable et honteux et comprendre que l’on ne provoque pas les maladies mentales mais qu’il s’agit souvent de prédispositions génétiques**.
Il faut donc libérer la parole… et les poils ! Une autre forme de tabou qui règne sur nos sociétés occidentales depuis trop longtemps au goût de certaines étudiantes. Sauf qu’ici, la contestation (principalement féminine) prend une tournure politique, même sans le vouloir (p. 13). En ne cadrant pas avec les normes esthétiques en vigueur, celles qui font le choix de ne plus se raser adoptent une attitude politisée et souvent associée au féminisme. Et si c’était simplement une autre façon de voir les choses, sans chercher à choquer l’opinion publique ?
* nouvelles.umontreal.ca, « Effet du cannabis sur l’évolution des troubles psychotiques », 11 juillet 2017. ** livescience.com, « Anxious Brains Are Inherited, Study Finds », 8 juillet 2015.