Après avoir organisé le Festival Air* l’an passé, l’organisateur du Festival T/S, Thomas Duret, propose cette année un événement indépendant sur les thèmes du temps et du silence. « Tout le monde court après le temps, et le silence ne se trouve nulle part ou presque, explique-t-il. Le but du festival est de proposer un temps d’arrêt aux citoyens. » Pour ce faire, le festival s’étale du 1er septembre au 30 novembre, et les performances des artistes, qu’il appelle aussi « interruptions », visent une déconnexion, au moins momentanée, de la réalité.
Plaidoyer pour un art déconnecté
Ce festival démontre que des projets artistiques prenant forme de manière ponctuelle peuvent exister dans l’instant présent, loin de toute technologie. Quand on les interroge à ce sujet, plusieurs artistes, attachés au festival ou non, mettent en avant les enjeux d’un art déconnecté tels que les dimensions humaines ou relationnelles. De plus, ils valorisent l’expérience inattendue avec l’art ainsi que l’expérience sensorielle et émotionnelle que l’on ne retrouve pas avec des vecteurs multimédias.
C’est le cas de l’artiste Eddie Maleterre, qui propose la performance « Puissance Cube » au festival. Il partage cette conception, même s’il ne dénigre pas un art plus connecté. « Une photo d’une œuvre ça ne touche pas comme une œuvre, analyse-t-il. Une œuvre, ça vient nous chercher ou non, ça crée une émotion. »
Suivant cette logique, M. Duret explique que la place du public dans le festival a été pensée de façon différente selon les projets. Le but n’est pas d’augmenter le nombre de participants aux événements, mais de permettre à toute personne, connaissant l’événement ou non, de vivre une expérience grâce à l’art. « On ne cherche pas à avoir une abondance de spectateurs, souligne-t-il. Ce
qui compte, c’est que les gens qui ont été là aient véritablement vécu une interruption. » Ainsi, le public peut assister d’une manière traditionnelle à certaines performances ou prendre part à des projets participatifs en étant informé, mais il peut également être invité à découvrir ou à participer à certains projets par hasard. « Le but est de se laisser guider par son ressenti et peut-être ensuite de mener une réflexion », affirme l’organisateur. Il ajoute que d’autres prestations impliquent un public invisible. Autrement dit, le spectateur ne sait pas qu’il est en train d’assister à une performance. Le but est que l’art ne soit pas catégorisé, mais qu’il vienne juste interrompre le flot de pensées des gens qui y sont confrontés.
L’art à l’ère du numérique
Dans une large mesure, les artistes interrogés s’accordent en revanche pour pointer les avantages des réseaux sociaux, notamment en ce qui concerne la promotion des artistes et de leur travail ainsi que l’élargissement du champ de contacts. Le numérique est aussi globalement bien accueilli. « Je ne pense pas forcément que ce soit malsain, c’est juste une autre perspective, suggère un des membres du Collectif de designers Thomas Coulombe-Morency. Il faut l’accepter, l’art aussi a le droit d’évoluer. Ça permet d’explorer d’autres champs, d’élargir nos horizons. »
Les différents médias et les nouvelles technologies sont ainsi de plus en plus utilisés dans la réalisation de projets artistiques, que ce soit pour trouver de l’inspiration ou dans la conception des projets. C’est le cas d’une majorité de musées à Montréal, des Beaux-Arts au Centre d’exposition de l’UdeM.
* Le Festival Air est un événement éphémère d’arts vivants qui s’est déroulé dans des lieux abandonnés ou délaissés de Montréal, du 10 au 13 août 2017.
Dans ce cadre, 13 projets ont été réalisés autour de diverses thématiques sociopolitiques.