L’application, qui se nomme Ethica, collecte les données de déplacement, mais aussi d’interactions sociales des citoyens souhaitant participer à la recherche. « Nous portons tous sur nous un téléphone portable bardé de capteurs, qui collecte sans arrêt des données », souligne le professeur agrégé à l’École de santé publique de l’UdeM Yan Kestens. Pour le chercheur du projet INTERACT, les téléphones intelligents constituent un outil tout désigné pour récolter des informations utiles au projet.
Une technologie de pointe
Une telle collecte de données nécessite l’utilisation de plusieurs algorithmes et de nombreuses techniques d’analyse qui font le lien entre environnement, comportement et santé. Les chercheurs du projet collaborent donc avec des informaticiens, dont certains de l’UdeM. « Nous travaillons également avec des chercheurs en intelligence artificielle pour créer des logiciels capables de détecter les modes de transport utilisés », précise M. Kestens.
Les données GPS et l’accéléromètre, à savoir le capteur mesurant le mouvement du téléphone et donc de la personne qui y est associée, permettent à l’application de fonctionner. « Nous sommes ainsi capables d’estimer le niveau d’activité physique, le niveau de sédentarité, les modes de transport et donc le type d’environnement », expose-t-il. Pour des résultats plus précis, le projet utilise parfois le sensedop, petit appareil se portant à la hanche, mis au point au centre de recherche de l’Université, comportant lui aussi un GPS et un accéléromètre.
Se connecter pour la recherche
Près de 1 200 citoyens scientifiques de 18 ans et plus et aux profils variés participent au projet. « Notre objectif est de baser la recherche sur un échantillon de taille plus importante, pour aller chercher des données plus objectives, explique M. Kestens. Nous espérons arriver à au moins 3 000 citoyens scientifiques. » Si le projet est basé sur du bénévolat de la part des citadins, ceux qui s’inscrivent peuvent également gagner des prix sous la forme de bons d’achat.
Les citoyens scientifiques gardent l’application sur leur téléphone pendant 30 jours et doivent répondre à un certain nombre de questions. « Au début, on me demandait trois fois par jour si j’étais heureuse, s’amuse la participante à l’étude Caroline Cormier. Le fait de me le demander, ça m’a forcée à avoir un regard réflectif sur moi-même. »
C’est devenu, pour elle, un sujet de conversation. « Ça arrivait aux heures de repas, raconte celle qui enseigne la chimie au collégial. Je m’interrompais pour dire ?attendez, il faut que je regarde si je suis heureuse maintenant !? ».
Au fil du temps, Caroline a constaté que les questions sont devenues plus profondes et complexes. « J’ai l’impression qu’ils vont analyser ça pendant des années, ajoute-t-elle, en référence au nombre important de données recueillies. Ça va être très riche. »
Un partenariat engagé
Selon le responsable du secteur environnement urbain et santé à la Direction de la santé publique, Louis Drouin, le rôle de la santé publique est, entre autres, de collaborer avec des projets de recherche comme INTERACT.
« Améliorer l’activité physique de transport est une de nos priorités, raconte M. Drouin. Lorsqu’il [Yan Kestens] m’a parlé du projet, j’y ai tout de suite vu un partenariat essentiel à mettre en place, puisqu’il vise à évaluer les interventions urbaines pouvant favoriser la mobilité active. » Selon lui, ce type de partenariat avec la recherche donne également beaucoup de crédibilité aux résultats.
Depuis 2005, la Direction de la santé publique est en effet partenaire du plan de développement durable, avec la collectivité montréalaise.