Volume 25

La sexologue et chroniqueuse Véronique Larivière estime qu'il faut des cours d'éducation sexuelles pour les élèves du primaire et du secondaire (Crédit photo : Courtoisie Valérie Larivière)

Éducation à la sexualité pour tous

Les cours d’éducation sexuelle seront réintégrés dans les écoles primaires et secondaires dès septembre prochain. Bien que cette annonce ait été faite dans la foulée des scandales sexuels touchant des célébrités, un projet pilote est mené depuis septembre 2015 dans 19 écoles québécoises, à l’initiative du ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx. L’uniformisation de l’éducation à la sexualité dans l’ensemble de la province est l’objectif affiché de ce nouveau programme.

« Je ne suis pas sûre que tous les professeurs seront à l’aise pour parler de sexualité », estime l’étudiante en sexologie à l’UQAM et diplômée en enseignement au primaire, Emmanuelle Hébert.

La professeure et chercheuse à l’Institut de recherche et d’études féministes de l’UQAM Rachel Chagnon abonde dans le même sens. « Ils auraient besoin d’une formation complète pour répondre aux questions des élèves et aller au-delà de la matière prévue, soutient-elle. Dans le cursus de formation des enseignants, le sujet de l’égalité n’est pas abordé. C’est la base pour changer des comportements. Il faut changer la façon dont on perçoit les réalités féminine et masculine. »

Le soutien des sexologues

Depuis l’abolition du cours de Formation personnelle et sociale en 2001, l’éducation sexuelle est laissée à la discrétion de chaque établissement scolaire.

À l’école secondaire Monseigneur-Richard, la direction a pris l’initiative d’offrir des cours donnés par des sexologues plutôt que par des infirmières, et ce, dès la première année. « Il y a certaines choses dont nos parents nous avaient parlé, mais ça m’a appris beaucoup sur l’acceptation de soi et comment vivre avec la sexualité, explique l’élève de cinquième secondaire Philippe. C’est l’aspect psychologique qui a vraiment été utile pour moi. »

La sexologue et chroniqueuse Véronique Larivière, tout comme Emmanuelle, estime que l’approche utilisée à l’école Monseigneur-Richard est intéressante. « Les sexologues sont déjà formés pour parler de ces sujets, plaide Mme Larivière. Ils peuvent assurer une qualité de l’information transmise. »

Selon Emmanuelle, il s’agit également d’une bonne façon de rassurer les parents inquiets. « Les sexologues peuvent aussi faire un suivi avec les élèves, répondre à leurs questions après la formation », ajoute-t-elle. Elle craint que les parents ne soient réticents au nouveau programme pour des questions de croyances ou de valeurs.

Mme Chagnon précise que les sexologues sont formés sur les enjeux sociaux liés à la sexualité. « Ils peuvent plus facilement déceler des problèmes chez certains élèves, rappelle-t-elle. Une question qui pourrait paraître anodine pour la plupart des gens peut sonner comme une alarme chez un sexologue. »

Les effets de l’absence d’éducation à la sexualité

Dans son cabinet, Mme Larivière voit les effets de l’absence d’éducation à la sexualité des dernières décennies. « Les jeunes hommes que je reçois éprouvent des problèmes érectiles reliés à la consommation de pornographie, explique-t-elle. Ils veulent reproduire ce qu’ils ont vu avec leurs jeunes compagnes et, en l’absence de repères, les jeunes femmes ont tendance à accepter même si elles sont inconfortables. »

Mme Chagnon évoque les médecins qui constatent une augmentation des infections transmises sexuellement chez les jeunes adultes. « L’absence d’éducation sexuelle a un réel impact », affirme la chercheuse.

Selon Emmanuelle, le nombre d’heures prévues pour le nouveau programme d’éducation sexuelle, compris entre 5 et 15 heures, est insuffisant. Elle affirme que les sujets devant être abordés sont nombreux, complexes et ne peuvent être parsemés ici et là dans le cadre des autres cours du cursus. Bien qu’ayant des défauts, elle conclut que le nouveau programme est nécessaire et qu’il constitue un premier pas dans la bonne direction.


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