« Ce qui pose problème, c’est cette logique punitive, même plus que punitive, car elle construit l’aide à partir d’une conditionnalité de participation », lance la professeure à l’École de travail social de l’UdeM et directrice de l’Observatoire sur les profilages, Céline Bellot. Pour cette professeure qui a ajouté son nom à la liste de professeurs appuyant la campagne du Collectif, la participation des jeunes prestataires n’est pas une question de volonté mais d’obstacles, avec un réel besoin de soutien.
« Actuellement, une personne seule bénéficiant de l’aide sociale reçoit un montant qui permet de couvrir seulement 50 % de ses besoins de base, indique-t-elle. En coupant davantage, on place les gens dans des difficultés insurmontables, notamment l’itinérance. » Mme Bellot prend l’exemple d’un jeune en situation d’itinérance, dont les problèmes de santé mentale ne sont pas pris en charge. Celui-ci pourrait alors connaître plus de difficultés à sortir rapidement de l’aide sociale.
Selon la professeure au Département d’histoire de l’UdeM Denyse Baillargeon, qui a également dénoncé le projet de loi, l’expérience montre que ce procédé ne fonctionne pas. « L’État n’est jamais prêt à mettre en place les mesures nécessaires pour vraiment aider ces personnes, malgré les bonnes intentions, affirme-t-elle. Cela devient des mesures uniquement punitives, faites avant tout pour sortir les gens de l’aide sociale et non pour les aider à entrer sur le marché du travail. »
La loi 70 prévoit également que les nouveaux demandeurs d’aide sociale suivent un plan d’intervention d’au moins un an avec accompagnement personnalisé. Cela ne semble pas une mauvaise idée d’après Mme Bellot, à condition de bien penser cet accompagnement. « Ces personnes arrivent avec des vulnérabilités parfois conjoncturelles et momentanées, parfois plus profondes », explique la professeure. Selon elle, accompagner est souvent synonyme de rétablir la personne dans sa dignité, sa confiance et ses conditions de vie, avant de songer à trouver un emploi.