« C’est vrai qu’on est loin de tout ce qui se passe en Europe, mais il y a un réel intérêt des étudiants pour cette cause, assure la cofondatrice et directrice de Singa Québec, Jasmine Van Deventer. On se rapproche de plusieurs universités pour faire des partenariats ; elles vont nous aider dans des activités, comme des événements de sensibilisation et de mobilisation sur la question des réfugiés ou des projets à visée pédagogique […]. »
Singa est une plateforme de rencontres entre les réfugiés et les habitants de leur pays d’accueil. « L’association est une communauté de citoyens internationale, décrit Mme Van Deventer. Notre action s’inscrit dans une vision d’entrepreneuriat social et d’échange interculturel. » Le projet a vu le jour il y a trois ans et tend à s’implanter dans différents pays, notamment dans les universités.
Viser l’intégration sociale
Le président de l’association africaine de l’UdeM Africasum et étudiant au baccalauréat en science politique, Moussa Diabira est enthousiaste à l’idée d’établir un partenariat avec Singa. « La question des réfugiés n’est pas étrangère aux thématiques que notre association a l’habitude de mettre de l’avant », pointe-t-il. Son association se concentrera sur les programmes linguistiques avec des cours de français, dispensés par des tuteurs. « S’ils [NDLR : les réfugiés] sont là, c’est que leur bien-être a été touché, conclut Moussa. Nous souhaitons les intégrer parce que le premier principe de notre association reste le vivre ensemble. »
La professeure titulaire de la chaire en relations ethniques à l’UdeM Marie-Thérèse Chicha rappelle d’ailleurs que l’intégration sur le marché du travail reste difficile. « Les immigrants économiques sont sélectionnés par le Canada en fonction de leurs diplômes et ils ont pourtant des difficultés à s’intégrer sur le marché du travail, rapporte-t-elle. Alors, c’est encore plus difficile pour les réfugiés qui arrivent sans avoir été sélectionnés en fonction de leur travail ou de leur langue et qui viennent en plus dans des circonstances d’urgence. » D’un point de vue professionnel, des partenariats entre des organismes d’aide aux réfugiés et les milieux universitaires pourraient ainsi permettre de créer un réseau de contacts pertinent, selon elle.
Dans cet objectif, le comité interuniversité SOCENT, qui vise la promotion de l’économie sociale et de l’entrepreneuriat par le biais d’une plateforme, est en train de préparer son partenariat avec Singa Québec. Selon la cofondatrice de SOCENT et étudiante au baccalauréat en science politique et développement international à l’Université McGill, Clélia Clothier, les récents événements interpellent les étudiants. « Le projet Singa m’a plu, notamment le fait d’aider les gens et de connecter les citoyens entre eux », résume-t-elle. SOCENT participera au projet en partageant son réseau, constitué d’étudiants et d’entrepreneurs sociaux. « Lorsque Singa sera intégré à notre plateforme, n’importe qui souhaitant aider l’association dans sa mission, comme connecter les réfugiés aux citoyens, sera en mesure de le faire », croit-elle.
Pallier les carences, sans concurrence
Pour la directrice de Singa Québec, l’organisme n’a toutefois pas vocation à concurrencer les services gouvernementaux, comme les centres locaux de services communautaires ou le service des personnes immigrantes au Québec. « Nous établissons des partenariats avec ces services, mais nous voulons surtout sensibiliser les membres de la société, soutient-elle. Le meilleur moyen d’intégrer les réfugiés est de créer un pont entre eux et leur pays d’accueil. »
Selon Mme Chicha, les organismes qui viennent en aide aux réfugiés et aux immigrants sont nécessaires à l’action du gouvernement. « Le gouvernement ne fait pas grand-chose pour les accueillir, expose-t-elle. Ces organismes sont souvent composés de personnes elles-mêmes réfugiées ou immigrantes et qui comprennent la situation de celles qui s’adressent à elles. » Bien que les institutions publiques demeurent indispensables, elles sont aussi plus formelles, selon la professeure. « Il y a une certaine flexibilité dans ces organismes, les membres sont plus disponibles en dehors des heures de travail par exemple », illustre-t-elle.
Les acteurs de la société civile souhaitant participer à de tels projets doivent aussi être formés, d’après Mme Chicha. « Il faut toutefois des compétences spécifiques pour travailler avec des personnes réfugiées, afin de ne pas les orienter n’importe où », note-t-elle. Mais entrer en contact directement avec ses futurs concitoyens reste la première étape vers l’intégration sociale.
Pssst !
Au moins une autre organisation projette également de venir en aide aux réfugiés à Montréal. L’entreprise Living the Lingo commence son activité et souhaite aider les nouveaux arrivants dans la métropole.