Culture

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L’improvisation, cet art qui consiste à produire un court spectacle sans préparation préalable, est en pleine effervescence à Montréal. Tous les soirs, des dizaines de joueurs prennent d’assaut les bars de la métropole. Portrait de quatre ligues différentes, dont trois théâtrale et une picturale.

La Semi-Lustrée :

La Semi-Lustrée joue tous les mercredis soirs, 19h30, au Pub Brouhaha, situé rue de Lorimier. Quatre équipes aux noms plus loufoques les uns que les autres s’affrontent régulièrement : les Mauves-moment magique, les Rouges-joues de geisha, les Oranges- cuir de vache et les Bleus-rendez-vous secret. À chaque match, deux équipes sont réunies sur scène et livrent de courtes performances théâtrales sur la base de thèmes décidés par l’arbitre.

« La ligue la plus sexy en ville », pour reprendre l’expression de Benoît Ash, fondateur de la Semi-Lustrée, est dotée d’un système de vote bien particulier. Plutôt que de voter pour l’une des deux équipes après chaque performance, le public est invité à voter pour le spectacle. Selon que « ça passe ou ça casse », aucun point ne sera attribué ou alors un point ira aux deux équipes. « On met l’accent sur la coopération et non la compétition, explique Benoît Ash. Les deux équipes travaillent ensemble pour produire une bonne impro au lieu de s’affronter et personne n’écrase personne. La qualité du spectacle s’en trouve améliorée. »

Principalement issus de l’École nationale de l’humour, les improvisateurs de la Semi-Lustrée font partie des quelques candidats qui ont su se démarquer lors du camp de recrutement annuel. Leur talent leur permet de se mesurer à des joueurs de d’autres pays lors de tournées à l’étranger.

Les Cravates :

La ligue des Cravates investit tous les dimanches soirs la scène du Petit Medley. Dès 20h, les joueurs font leur entrée tels des stars, portés par les applaudissements du public et une musique entraînante.

Les Cravates font eux aussi dans l’improvisation théâtrale, mais fonctionnent selon le système de vote traditionnel : une équipe est désignée gagnante à la fin de chaque performance et de chaque match. Par contre, il n’y a pas de compétition parce que les équipes ne sont pas fixes. D’une semaine à l’autre, un joueur peut appartenir autant à l’équipe des Noirs qu’à celle des Blancs.

Simon Boudreault, qui a fondé la ligue en 1993, voit chaque année défiler de nouveaux joueurs talentueux : « On n’est pas tous comédiens ou humoristes, précise-t-il, mais ça prend une expérience significative en improvisation pour intégrer la ligue. »

L’équipe des Cravates se distingue aussi par son concours hebdomadaire grâce auquel on peut gagner une bière gratuite (« que tu ne paies pas! ») et une entrée pour deux pour le match suivant. La tradition des anti-étoiles est également propre aux Cravates et consiste à souligner les pires performances de la soirée. Les trois joueurs ainsi désignés doivent alors se reprendre au cours d’une impro de punition.

La Rocambolesque :

La Rocambolesque est plus qu’une ligue d’improvisation : c’est « un organisme se dévouant à l’avancement de l’improvisation et à sa mise en marché » et qui « s’efforce de créer des plate-formes d’expression de qualité pour plusieurs catégories de comédiens », peut-on lire sur son site web. La Rocambolesque regroupe quelque 250 membres, joueurs et administrateurs, et se produit un peu partout dans la région métropolitaine, dont au St-Ciboire et au St-Sulpice. Inventive, elle s’efforce de créer de nouveaux concepts d’improvisation. Par exemple, elle peut recourir à des marionnettes ou faire intervenir le public en lui demandant d’envoyer des messages texte aux joueurs!

« À la Rocambolesque, tout le monde peut jouer, explique Rémi Boulianne, directeur général de la Rocambolesque et ancien joueur. Le monde de l’impro est généralement difficile à intégrer; or c’est par la pratique qu’on s’améliore. » Ainsi, il existe différentes divisions pour les joueurs pas du tout à très expérimentés. Pour Marie-Christine, être membre de la Rocambolesque signifie « lâcher son fou ». « C’est mon côté show-off », avoue celle qui ne fait pas de théâtre dans la vie. Quant à David, comédien professionnel et improvisateur depuis 17 ans, « faire de l’impro aide à faire du théâtre. Grâce à l’impro, j’ai plus de facilité à intégrer une note de jeu au théâtre. »

La Rocambolesque dispense aussi des ateliers de perfectionnement et un centre de formation et de diffusion, destiné à assurer la croissance de la ligue, est à prévoir très bientôt.

Le Virus d’improvisation picturale :

Seule ligue d’impro-peinture au monde, le VIP se produit tous les premiers jeudis du mois au bar Le Belmont. Comme dans les ligues d’improvisation traditionnelles, deux équipes s’affrontent sur scène sur la base d’un thème quelconque. Les joueurs ont de quinze à vingt minutes pour produire une œuvre d’art, au terme desquelles le public votera pour celle qu’il préfère. À la fin du match, les toiles seront vendues lors d’un encan, principale source de financement de la ligue.

Nadine Samuel et Johanne Picard, « piliers du VIP » et artistes professionnelles, sont à la tête de l’organisme à but non-lucratif depuis bientôt trois ans. « On ne fait pas de publicité par manque de moyens, mais le public se renouvelle constamment malgré tout. On essaie de multiplier les contacts en combinant la peinture à d’autres disciplines : musique, danse, etc. »

Tous bénévoles, les artistes et collaborateurs du VIP se destinent à « rendre la peinture vivante et plus accessible à la communauté » et à la « faire rayonner nationalement. Une façon dynamique de projeter l’univers des artistes hors de leurs ateliers tout en stimulant l’inconscient collectif des Québécois », peut-on lire sur le site web. C’est le cas de le dire, le VIP vous promet à chacun de ses matchs une soirée haute en couleurs.

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