Il n’est pas encore 20h et, à vue de Français, Montréal est à au moins 20 000 degrés sous la barre du zéro Celsius. Quelques braves locaux font causette devant les portes du Métropolis, mais on rentre directement. Dans quelques minutes démarre le Show du cadenas deuxième mouture, célébrant (autant que faire se peut) les deux ans de lock-out des 253 employés du Journal de Montréal.
Premier objectif, retirer les accréditations. Ce n’est pas bien compliqué: le sésame se trouve dans le patronyme de mon amie. La salle n’est pas tout à fait pleine, mais il ne reste plus de sièges au balcon. En bas, quelques tables sont inoccupées, alors on tente de s’installer… c’était sans compter sur le colosse en costard. «Excusez, messieurs-dames, c’est réservé aux politiques ici!». C’est jamais drôle de se faire jeter, mais bon, je suis là pour raconter l’évènement, pas pour accroître ma cote de popularité, alors on s’en va. Et on laisse l’emplacement à ceux qui, ce soir, ont besoin d’être vus plus que de voir.
Aux Zapartistes d’ouvrir la soirée avec une imitation d’Amir Khadir… qui ne fait finalement pas rire grand monde. Est-ce que c’était le sketch qui était mauvais ou le public trop attaché à la personnalité? Aucune idée, mais je m’en fous pas mal dans le fond: y’a Damien Robitaille qui s’en vient. Simplement accompagné d’un bassiste, il fait sa job. Et bien, en plus! Je découvre et apprécie: enfin un peu de soleil et de sourire en cette soirée à ne pas mettre un pingouin dehors.
Place à une nouvelle imitation: le Pierre-Karl Péladeau version Christian Vanasse rencontre plus de succès que la précédente tentative et son concept de «défoulement collectif» est visiblement bien assimilé. À titre très personnel, j’aurais préféré assister à un combat à mains nues one-on-one, mais bon, tous sur un, c’est bien aussi.
Au tour d’une légende d’entrer en scène: Gilles Vigneault honore le Show du cadenas le temps de deux morceaux et je ne peux que lui donner raison «[ce] pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver !». Ça ne m’empêche pas d’aller m’emboucaner les poumons à l’entracte qui suit.
L’intermède suivant est très long, et trop politique à mon goût. J’admire cependant les talents du journaliste Gil Courtemanche qui épluche avec brio le dictionnaire pour trouver des synonymes de voyou qui colleraient à PKP. Suivent les Zapartistes, avec une excellente parodie des Loco Locass: Libérez nous de Péladeau.
Bernard Adamus est le prochain à envahir la scène avec son band énervé. Encore une fois, je suis musicalement conquis: la contrebasse claque fort et bien, le banjo pose les mélodies et le trombone emporte ce blues québecois un cran au-dessus de ce que j’imaginais.
Dernier groupe à se présenter, mais non des moindres: Karkwa. Il semble que leur dernier album, Les chemins de verre, a remporté un très grand succès critique, mais je n’arrive pas à adhérer. Le volume sonore, qui était jusque-là parfait, devient insoutenable et ma concentration s’échappe. «Irish goodbye»; on file à l’anglaise, retrouvant la froideur des rues. C’était un bon show, j’ai découvert bien du monde et je n’ai pas perdu mon temps. En espérant que les lock-outés auront apprécié le soutien… et qu’il n’y aura pas de troisième édition.