Votre patrimoine de star

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Par Pascaline David
mercredi 10 novembre 2010
Votre patrimoine de star
Votre patrimoine de dépanneur

Échos Vedettes, 7 Jours, Le Lundi et Dernière Heure sont des magazines qui reçoivent plus de 100 000 $ en subventions fédérales par année. À quel point les rumeurs, déclarations, potins et primeurs concernant les vedettes vous intéressent-ils ? Beaucoup? Tant mieux. Pas du tout ? Changez d’attitude. Vous ne voudriez surtout pas avoir l’impression que vos piastres sont employées à mauvais escient.

Votre patrimoine de dépanneur

Dit d’une autre façon et avec des chiffres plus effarants , e n 2009 , Quebecor avait reçu, depuis deux ans, une aide financière fédérale de 2,15 M$ dans le domaine du magazine. Sentier Chasse-Pêche reçoit, lui aussi, une aide financière annuelle de quelques dizaines de milliers de dollars, et ce, pour vous transmettre de l’information pratique : «Chevreuil : il est peut-être temps de modifier votre stratégie. » Il faut bien se nourrir, direz-vous. Oui. Ricardo, ce héros qui nous apprend à mieux cuisiner, est, lui aussi, subventionné. Plein d’autres périodiques existent un peu grâce aux fonds publics (les vôtres, s’il faut le répéter). Tous ces chiffres donnent évidemment le goût de mettre en marché une revue concernant l’hygiène dentaire, le VTT, les poneys et les chevaux. Pourquoi ? Parce que c’est rentable en « viarge ».

Logique culturelle industrielle

[Il existait jadis un Programme d’aide aux publications (PAP), qui versait des subventions pour réduire les tarifs postaux des magazines et journaux non quotidiens, ainsi qu’un Fonds du Canada pour les magazines (FCM), qui appuyait la création de contenu rédactionnel et l’expansion de l’industrie des magazines. Il existait, dans le FCM, un programme d’aide aux magazines artistiques et littéraires, bouée de sauvetage des petites publications. Au printemps 2010, après une vaste période de consultation dans l’ensemble du Canada, et dans l’objectif de stabiliser son système de financement, Patrimoine Canada annonçait la création du Fonds du Canada pour les périodiques (FCP*), en remplacement du FCM et du PAP. Le FCP est une enveloppe de 75 M$.]

Depuis la restructuration des programmes fédéraux destinés à l’industrie des périodiques , une revue n’est admissible au programme de subventions de Patrimoine Canada qu’à condition de tirer 5000 exemplaires par publication. Autrement dit, le périodique culturel créatif, qui publie généralement moins de 500 exemplaires, ne touche plus un rond de Patrimoine Canada*. La situation est problématique chez le périodique francophone québécois, qui s’adresse à un petit bassin de lecteurs et qui n’a pas droit, comme son homologue de Vancouver (considéré en tant que minorité), à des conjonctures plus flexibles en termes de tirage. Actuellement, les trois quarts des 44 membres de la Société de développement des périodiques culturels québécois (SODEP) ne reçoivent plus un sou qui provient de vos poches. Le magazine 7 Jours en reçoit encore, et ce ne sont pas des rouleaux de «cennes» noires.

Sauf pour les périodiques agricoles, le montant maximal que peut octroyer Patrimoine Canada à une publication via le FCP est de 1,5 M$ par année. «Avec 1,5 M$, la SODEP, qui demande 800 000 $, serait financée deux fois. La disproportion est ridicule et aberrante », estime Patrick Poirier, directeur de la revue Spirale. Le problème, c’est que pour publier de façon massive, il faut de l’argent, ce dont ne manquent pas les éditeurs de magazine d’épicerie (à potins, de rénovations, etc.). Il ne suffit que de feuilleter leurs pages de publicité pour le constater. Avec tout l’argent de cette publicité (qui doit tout de même être limitée à 70 % du contenu total pour être admissible aux subventions de Patrimoine Canada), les «grands» magazines peuvent investir dans des moyens de production élevés et recevoir la récompense financière que le gouvernement accorde aux publications rentables, et ce, de façon proportionnelle.

«Le gouvernement actuel n’a pas une vision généreuse à l’égard de la culture, juge André Racette, adjoint à la direction de l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ). La vision du gouvernement est extrêmement de droite ; c’est le marché qui détermine dorénavant quelles revues doivent survivre. » Pourtant, le mandat d’une revue culturelle est de faire connaître de nouvelles oeuvres et de favoriser les échanges par rapport à diverses pratiques artistiques. «Je suis devenu un gestionnaire, un administrateur, je n’ai même plus le temps d’écrire, c’est complètement dément. On n’est pas des compagnies, on est des organismes sans but lucratif !», s’enflamme Patrick Poirier. Pour Rina Olivieri, propriétaire de la librairie Olivieri, haut lieu de la culture à Montréal, la situation est illogique : «L’État doit aider les entreprises qui jouent un rôle culturel, pas les revues commerciales. Des auteurs très importants apparaissent dans de petites revues culturelles.» Oui. Mais des auteurs, ce n’est pas vraiment payant.

Il n’y a pas que le patrimoine

Il existe tout de même d’autres programmes gouvernementaux visant à aider les petites publications d’art et de littérature. Le Conseil des arts du Canada ainsi que celui du Québec évaluent les demandes des éditeurs de périodiques tirant au moins 500 exemplaires par publication. La publication doit, dans les deux cas, avoir publié deux numéros. L’aide aux périodiques d’art et de littérature du Conseil des arts du Canada comporte aussi un volet relève qui permet aux publications tirant un minimum de 100 exemplaires de faire une demande de subvention de l’ordre de 5000 à 15000 dollars. Le Conseil des arts de Montréal offre pour sa part un programme de parrainage fiscal.

Bref. Rien de nouveau sur le papier glacé.

Cette semaine dans Le Lundi : «L’argent m’a nui.» : La nouvelle Ginette Reno fait son bilan.

 

* Qu’est-ce que le Patrimoine canadien?

 

** Le FCP offre une aide financière à des magazines, à des journaux non quotidiens et à des périodiques numériques canadiens afin qu’ils puissent continuer à publier le contenu que les lecteurs canadiens choisissent de lire.