Une question de migrations

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Par Sophie Arbour
mercredi 10 décembre 2014
Une question de migrations
Les pères Noël sont devenus un des symboles commerciaux de cette fête religieuse.
Crédit photo : Isabelle Bergeron
Les pères Noël sont devenus un des symboles commerciaux de cette fête religieuse.
Crédit photo : Isabelle Bergeron
Alors que certains attendent le temps des fêtes avec impatience, d’autres y sont plutôt indifférents. Parmi les causes de ce désintérêt, ressort l’impression que Noël est une célébration récupérée par les grandes compagnies et leurs intérêts capitalistes. Selon une croyance populaire, le personnage du père Noël serait d’ailleurs le produit de l’entreprise Coca-Cola. Est-ce bien le cas?
«Ce sont des Hollandais qui ont fondé New York. Ils ont emmené avec eux des fêtes religieuses en lien avec le culte de saint Nicolas.»
Sylvain Desrochers, Responsable du certificat en publicité de l’UdeM

«Le personnage, tel qu’on le connaît aujourd’hui, je pense que c’est Coca-Cola qui l’a créé, affirme l’étudiant au baccalauréat en informatique Maxime Tremblay. Mais le personnage d’origine qui donne des cadeaux, je crois que c’est saint Nicolas.»

Au fil des siècles, Nicolas, évêque qui aurait vécu à Myre en Turquie au 4e siècle après J.-C., s’impose comme un saint incontournable dans les religions catholique et orthodoxe. Il cumule une impressionnante quantité de titres: patron de la Grèce, de la Russie, des enfants, des jeunes filles, des marins… «Il y a plein d’images auxquelles on ne peut pas toucher parce que ça fait partie de notre culture populaire, explique le doyen de la Faculté de théologie et de sciences des religions, Jean-Claude Breton. Si saint Nicolas a survécu, c’est probablement pour cette raison-là, même si dans ces pays du Nord qui sont devenus protestants, le culte des saints n’était pas bien vu.»

La vraie histoire du père Noël

Ce fameux saint Nicolas, célébré notamment le 6 décembre, est aujourd’hui associé au personnage du père Noël. Mais contrairement à la croyance populaire, Coca-Cola n’aurait pas inventé ce personnage, selon le responsable du certificat en publicité, Sylvain Desrochers . «La compagnie s’est basée sur les œuvres d’un illustrateur, parues dans une publication américaine», rappelle-t-il.

Le professeur fait référence au caricaturiste américain Thomas Nast, qui s’est lui-même appuyé sur les descriptions fournies par le poète américain Clement Clark Moore dans A visit from Saint Nicholas, publié en 1823. Tous deux habitaient New York et ont contribué à l’association de saint Nicolas au personnage du père Noël en Amérique du Nord.

«Ce sont des Hollandais qui ont fondé New York, raconte M. Desrochers. Ils ont emmené avec eux des fêtes religieuses en lien avec le culte de saint Nicolas.» C’est Coca-Cola qui, par une série de campagnes publicitaires amorcée en 1931, diffusera l’image du père Noël dans tous les États-Unis, puis en Amérique du Nord.

Cette vague expansive en précédant une autre, Coca-Cola procèdera, quelques années plus tard, à l’exportation de ses produits sur le vieux continent, y popularisant ainsi l’image du père Noël. «Coca-Cola a été introduit en Europe par des militaires qui, au cours de la Deuxième Guerre mondiale et alors qu’ils se trouvaient en sol européen, disaient vouloir en boire, affirme M. Desrochers. L’armée américaine a donc acheté du Coca-Cola pour ses soldats.»

Entre commercialisation et authenticité

Il est difficile d’évaluer les retombées de cette association entre Coca-Cola et le père Noël dans l’imaginaire des gens aujourd’hui. Plusieurs étudiants affirment spontanément que le père Noël est devenu essentiellement commercial. «C’est vraiment devenu un aspect de la mondialisation qui fait que les gens sont plus attachés au magasinage qu’aux valeurs de base, croit l’étudiant au baccalauréat en sciences politiques Kevin Saint-Jean. Ce sont les magasins puis les multinationales qui ont commercialisé le père Noël alors que les valeurs étaient bien meilleures au départ.»

D’autres attestent des valeurs de partage qui y sont associées. «C’est sûr que si tu regardes comment les commerces s’en servent, c’est quelque chose de commercial, estime pour sa part Maxime Tremblay. Mais je connais deux personnes qui se déguisent en père Noël dans des centres d’achats, et je vois qu’ils ne le font pas pour l’argent, mais pour faire plaisir aux enfants.»

Le 20 décembre, dans le cadre de la Fête de Noël des étudiants-parents de l’UdeM, après quelques animations prévues au Gymnase du CEPSUM, le père Noël devrait faire son apparition autour de 15 heures.