Une histoire de réforme

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Par Thomas Martin
vendredi 8 septembre 2017
Une histoire de réforme
La réforme du programme d’histoire au secondaire prendra effet dès cette année. crédit photo: Stéphanie Dupuis
La réforme du programme d’histoire au secondaire prendra effet dès cette année. crédit photo: Stéphanie Dupuis
La refonte du programme d’histoire au secondaire, récemment approuvée par le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, provoque des remous chez certaines communautés. Au-delà des polémiques autour de la confection du programme, c’est une nouvelle façon d’enseigner la matière qui voit le jour.
S’il y a un problème dans l’enseignement, il n’est peut-être pas seulement dû au programme.
Marc-André Éthier Professeur titulaire au Département de didactique

L’idée d’une révision du programme d’histoire n’est pas récente, comme l’indique le professeur titulaire au Département de didactique Marc-André Éthier. « Il faut se rappeler que depuis les années 1960, le programme d’histoire fait l’objet de discussions et d’une volonté de rénovation, notamment pour lier l’histoire enseignée dans les écoles et celle enseignée à l’université », explique-t-il.

Ces changements sont apportés sur le fond et sur la forme. « On passe d’un programme qui était chronologique en troisième année puis thématique en quatrième à un programme entièrement chronologique. » Les compétences requises par les élèves sont également modifiées. « Il faut maintenant que les élèves arrivent à caractériser une période de l’histoire du Québec et du Canada, tout en ayant la capacité d’interpréter une réalité sociale », précise le professeur.

La réforme est en gestation depuis plusieurs années, comme le confirme l’étudiante au baccalauréat en enseignement secondaire Alexendra Séguin. « Les professeurs qui nous enseignaient la pédagogie de l’histoire en première année nous en parlaient déjà, confie-t-elle. On a vite su qu’un changement allait avoir lieu, donc je ne suis pas surprise par la réforme. »

Des étudiants satisfaits

Pour l’étudiant au baccalauréat en enseignement secondaire Antoine Fiset, la réforme tombe à point nommé. « Lors de mes stages, j’ai vite remarqué que les élèves étaient tannés parce qu’ils voyaient souvent les mêmes choses d’une année sur l’autre, concède-t-il. Avec ce changement dans la méthode, on va pouvoir aller plus en profondeur dans certaines périodes et couvrir des choses qu’on n’avait pas forcément le temps de voir avant. »

En tant que futur enseignant, Antoine se félicite qu’une telle initiative ait vu le jour, même si l’urgence n’était pas de mise selon lui. « Je ne sais pas si ça méritait une réforme, mais j’en suis content », soutient-il. Un changement qu’il ne redoute d’ailleurs pas vraiment. « La refonte ne va pas me demander d’effort supplémentaire [dans la préparation du programme d’histoire]. Au contraire, ça va rendre les choses plus faciles, se réjouit-il. Je vais pouvoir intégrer les deux années ensemble en prenant le cadre chronologique et en y insérant les concepts fondamentaux. »

Des avis discordants

Alexendra, qui entame sa quatrième année de baccalauréat, s’inquiète cependant des évaluations. « À mon avis, c’est une bonne réforme sur le plan de l’apprentissage des élèves, mais ce qui m’inquiète, c’est que je n’ai rien vu concernant la structure des évaluations ministérielles en quatrième secondaire », soulève-t-elle.

La place des minorités dans le programme a également fait parler, la Commission scolaire du Nunavik critiquant le manque de considération à l’égard des Premières Nations. Un problème dont M. Éthier est conscient, tout en y apportant une nuance. « Selon moi, c’est la vision des Canadiens français qui est mise de l’avant, mais des efforts ont été faits pour donner une place plus importante aux minorités, comme les autochtones ou les immigrants », explique-t-il.

Antoine ne comprend pas vraiment les critiques faites à l’encontre du programme d’histoire. « On a un module complet consacré aux autochtones qui traite plus de l’aspect traditionnel, précise le futur enseignant. Personnellement, je fais part aux élèves de la situation actuelle, mais c’est trop récent pour être analysé de façon historique. Je ne pense pas que ce soit très pertinent. »

Une initiative qui devrait renforcer l’apprentissage de l’histoire au secondaire, mais qui ne sera pas la panacée, prévient M. Éthier. « S’il y a un problème dans l’enseignement, il n’est peut-être pas seulement dû au programme », met-il en garde. Selon lui, de plus grands changements surviendraient dans les écoles si la profession d’enseignant était reconnue davantage et si on accordait à ceux et celles qui s’y consacrent de meilleures conditions de travail.