Un anniversaire oublié

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Par Félix Lacerte-Gauthier
mercredi 27 janvier 2016
Un anniversaire oublié
Vue aérienne des Pavillons des Sciences sociales et du droit, en juin 1968. Courtoisie Division de la gestion des documents et des archives UdeM
Vue aérienne des Pavillons des Sciences sociales et du droit, en juin 1968. Courtoisie Division de la gestion des documents et des archives UdeM
Le Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques fête cette année son 50e anniversaire. Quartier Libre se penche sur les origines de sa création ainsi que sur son évolution.

Plongé dans ses recherches relatives à cet anniversaire, le professeur titulaire en études cinématographiques André Gaudreault livre son témoignage. « L’histoire du Département était à faire, reste encore à faire, et nous sommes en train de la faire, pense-t-il. Nous ne savions pas que c’était le 50e. On a eu un processus d’évaluation des programmes l’année dernière où il fallait trouver et marquer la date de création du Département. » C’est à ce moment-là que l’équipe s’est rendu compte que le Département fêtait son 50e anniversaire.

Originellement une discipline à l’intérieur du Département d’histoire, l’histoire de l’art, a pu s’en affranchir et devenir un département à part entière, notamment grâce aux efforts de son fondateur, Ludovic V. Randall. Ce dernier, un juif allemand, a fui l’Allemagne nazie pour s’installer à Montréal. « La première chose qu’on peut dire de M. Randall, c’est qu’il était quelqu’un d’original, commente M. Gaudreault. Il était d’abord banquier, puis il a enseigné l’histoire de l’art de nombreuses années, et c’est lui qui s’est battu pour établir un département. Il a dès le départ voulu inclure le cinéma dans les préoccupations ». Ce qui lui a valu les félicitations d’Erwin Panofsky, selon le professeur.

« Panofsky, si on peut choisir seulement un grand historien de l’art du xxe siècle, ce serait lui ! », s’enthousiasme la professeure en histoire de l’art Sarah Guérin. Erwin Panofsky a eu un grand impact dans son domaine par la publication de livres importants, portant sur l’iconologie, le fait de replacer les œuvres étudiées dans leur contexte social et historique. « Randall était déjà ami avec Panofsky à Hambourg, poursuit Mme Guérin. Randall le consultait pour avoir des noms d’autres professeurs qu’il pouvait embaucher pour construire le Département d’histoire de l’art à l’UdeM. Donc, tous nos premiers professeurs n’étaient identifiés par nul autre qu’Erwin Panofsky avant de venir enseigner ici ! »

Croissance exponentielle

Le Département a connu également des avancements significatifs au cours des cinq décennies, notamment sous la direction de Philippe Verdier, qui succéda à M. Randall. De discipline en quête d’acceptation, qui n’était encore enseignée nulle part, les études cinématographiques sont aujourd’hui devenues un domaine d’études faisant pleinement partie du paysage universitaire. « Dès 1966 on a fait un programme en études cinématographiques et c’est probablement le premier de la francophonie, raconte M. Gaudreault. Au début il n’y avait que des mineures, puis il y a eu des maîtrises, des baccalauréats et des majeures. Et depuis 2007, nous avons même un doctorat en études cinématographiques. Nous avons été les premiers au Canada à le proposer ». Il précise qu’à ses débuts, il y a 25 ans, les universités francophones en cinéma ne comptaient que deux ou trois professeurs, contre une quinzaine aujourd’hui.

La perception du cinéma a également changé avec l’arrivée de nouvelles technologies, particulièrement le numérique. « La distance entre les spectateurs et les films est beaucoup moins grande, relate M. Gaudreault. Les films sont vus sur toute une série d’appareils, qui servent aussi à visionner d’autres types de production audiovisuelle. Il y a un brouillage des frontières qui fait que nous, spécialistes de cinéma, nous pouvons nous demander si on ne devrait pas s’ouvrir aux autres médias audiovisuels. On commence à se sentir à l’étroit dans les études cinématographiques. »

Comme plusieurs étudiants interrogés, l’étudiant au baccalauréat en études cinématographiques Nicolas Romillard se dit surpris d’apprendre que le Département fête déjà ses 50 ans. « Je ne sais pas s’il y a des activités spéciales de prévues, ajoute-t-il. S’il y en a, on n’en a pas fait la publicité. » Plusieurs événements devraient être annoncés prochainement par le Département, dont une conférence de l’ancien directeur du Musée des beaux-arts de Montréal et de celui du Canada, Pierre Théberge, qui aura lieu mi-avril. D’autres événements devraient suivre à la rentrée d’automne 2016.

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