Un de blogue pour les gars, par les gars

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Par Eléonore Bunhiol
mercredi 18 septembre 2013
Un de blogue pour les gars, par les gars
Létudiant en communication Pierre-Luc Massey est blogueur pour Ton Barbier. (Crédit photo : Pascal Dumont)
Létudiant en communication Pierre-Luc Massey est blogueur pour Ton Barbier. (Crédit photo : Pascal Dumont)

Le petit nouveau de la sphère internet montréalaise lancé le 28 août dernier s’appelle Ton Barbier et c’est un blogue de mode entièrement consacré aux gars. Créé par un ancien étudiant de l’UdeM et écrit par une équipe de pigistes masculine, le site aspire à devenir une plateforme incontournable pour les jeunes branchés. Pourtant, intéresser la gent masculine à la mode reste un vrai défi.

« C’est le premier blogue mode de grande envergure pour les hommes à Montréal », annonce le fondateur du site Julien Poissant. Cet ancien du certificat en publicité de l’UdeM nourrit depuis près d’un an ce projet audacieux avec Newad (l’agence web qui gère les sites Nightlife et Ton Petit Look): parler de mode au quotidien en s’adressant exclusivement aux messieurs. « Notre but, c’est de simuler l’ambiance qu’il y a dans un vrai barber shop, précise Julien. Ton barbier, c’est quelqu’un en qui tu as confiance et qui est là pour te conseiller. »

Pour l’instant, la recette du site de mode au masculin fonctionne. « On a eu plus de 30 000 pages vues en 10 jours », affirme Julien. Les gars de Ton Barbier se réjouissent de cet engouement. « On dirait qu’on a rempli un besoin criant sans qu’on s’en rende compte », s’enthousiasme l’étudiant en communication à l’UdeM et pigiste à Ton Barbier, Pierre-Luc Massey.

L’équipe de Ton Barbier compte huit pigistes, pour la plupart étudiants. Approché par Julien l’année dernière, Pierre-Luc a tout de suite été emballé par l’idée. « La mode masculine prend de plus en plus d’importance, croit-il. Ces blogues sont souvent anglophones, c’est le fun d’avoir une alternative francophone. »

Malgré leurs pantalons serrés et leurs cols boutonnés, les jeunes barbiers ne veulent pas être associés à un seul look. « On ne veut pas forcer un esthétisme, explique Julien. Il ne s’agit pas de dire : “le gentleman urbain de Montréal est en chemise et cravate.” Tu peux t’habiller comme tu veux. »

Avec des articles aux titres aussi évocateurs que « Comment porter du néon sans perdre sa crédibilité », ce blogue auto revendiqué « repaire du gentleman urbain » veut décomplexer la mode masculine. Une attitude encouragée par un flot quotidien d’articles où l’on trouve un peu de tout : bons plans de magasinage, listes de lectures de nouveautés musicales, et aussi la présentation de créations mode locales.

Le vrai défi pour les jeunes blogueurs reste de trouver leur lectorat dans la jungle d’internet. Le professeur à l’École de mode de Montréal Serge Carrier estime que rejoindre la population visée par Ton Barbier sera difficile. « Peu de gars disent aujourd’hui qu’ils regardent ces sites, avance-t-il. Ce sont les femmes qui réalisent 95% des achats de vêtements. »

 

La mode masculine, vilain petit canard ?

Maxime Gauthier, étudiant en biologie à l’UQAM et blogueur pour Rouge à Lèvres et Nœud-Papillon, préfère s’adresser aux filles. « La tendance à associer plus de temps à l’esthétique chez la femme rend la tâche plus aisée, explique ce jeune expert en soin du visage. La plupart des gars ne sont probablement pas encore rendus à suivre des blogues pour leur style. »

Pour le professeur Serge Carrier, le problème est dû à une offre réduite. « La mode masculine reste très traditionnelle, argumente-t-il. Même si ça s’améliore, il y a des types de produits que les hommes ne voudront jamais porter. »

Si la mode masculine traîne cette réputation de parent pauvre de l’industrie, Julien Poissant croit pouvoir relever le défi. « On va amener les hommes à prendre plus de risques, à moins s’identifier à un seul style », promet-il.

Quant aux clichés souvent prêtés aux blogueurs mode, Julien et Pierre-Luc assurent ne pas en avoir été victimes jusqu’à présent. « C’est sûr, des gens vont penser que la mode et la virilité ne vont pas ensemble, mais beaucoup de tabous ont été mis à terre, il y a moyen aujourd’hui de bien s’habiller sans avoir l’air d’une victime de la mode », affirme Pierre-Luc.

À l’avenir, Julien Poissant voit le site avancer vers plus de contenus inédits, comme un vrai magazine. « On aimerait aussi faire des séances photo maison avec notre équipe et montrer que des hommes normaux peuvent faire les mannequins », espère-t-il. L’autre projet de Ton Barbier serait d’atteindre un jour la popularité des grands blogues féminins francophones, pour aboutir à une certaine parité.