Traduire la lumière en son

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Par Louis-Philip Pontbriand
mardi 27 août 2019
Traduire la lumière en son
Stéphanie Castonguay lors de la représentation de L'Ensemble d'oscillateurs, au festival MUTEK le 24 août dernier (crédit photos Louis-Philip Pontbrilland)
Stéphanie Castonguay lors de la représentation de L'Ensemble d'oscillateurs, au festival MUTEK le 24 août dernier (crédit photos Louis-Philip Pontbrilland)
Une étudiante de l’UdeM conçoit et construit des appareils qui transforment les ondes lumineuses en signaux sonores. À la fois performance d’art visuel et spectacle musical, sa nouvelle création Scanner me, Darkly s’inspire des romans futuristes de Philip K. Dick. Quartier Libre a rencontré l’artiste en marge de son passage au festival MUTEK, le 24 août dernier.

« Je fais du son pour mieux l’apprivoiser », explique l’étudiante qui commencera le programme de maîtrise en composition et création sonore à l’UdeM en septembre, Stéphanie Castonguay. Cette artiste multidisciplinaire crée des agencements musicaux à l’aide de têtes de scanners et de panneaux solaires recyclés : les premières émettent de la lumière qui est ensuite captée et transformée en impulsions électriques par les seconds. De là, elle explique qu’une modulation et une amplification permettent d’écouter le signal sonore qui en résulte.

 Thérapie DIY

 « Un soir, je me suis retrouvée devant un cas d’obsolescence programmée : un scanner avait cessé de fonctionner, parce que son logiciel pilote était devenu désuet, raconte celle qui détient aussi un baccalauréat en arts visuels et médiatiques ainsi qu’un DEC en cinéma. J’ai ouvert le scanner pour le côté thérapeutique de la chose, ce qui m’a fait réaliser que ses composantes pouvaient aussi servir à faire de la musique. »

Bien qu’elle consacre désormais ses études à la musique, son ingrédient de base demeure la lumière, et donc le visuel. « Chaque couleur a sa fréquence, tout comme les sons », précise-t-elle. Sa création s’inspire du roman de science-fiction dystopique de l’auteur américain Philip K. Dick, A Scanner Darkly, paru en 1977 et porté au grand écran par le réalisateur Richard Linklater en 2006.

 Le chant du cygne des circuits électriques

Stéphanie déclare dessiner ses propres circuits imprimés, qu’elle expose ensuite à une solution chimique afin de capter en direct le son de leur destruction. « Le son change à mesure que le circuit se dégrade », explique-t-elle.

L’étudiante a présenté Scanner Me, Darkly pour la première fois à l’UdeM en mai dernier lors des concerts de session, dans le cadre de la série Ultrasons. À MUTEK, un festival de performances audiovisuelles et de musiques électroniques, elle a également participé au projet Ensemble d’oscillateurs, dirigé par le professeur adjoint au sein du secteur des musiques numériques de l’UdeM, Nicolas Bernier. Le collectif interprète des compositions des artistes pionniers et contemporains, exclusivement à l’aide d’oscillateurs. Ces appareils permettent de générer des ondes périodiques de forme sinusoïdale, carrée ou quelconque, que l’on peut amplifier et écouter.

 L’étudiante en psychologie Mathilde Jourdain dit avoir apprécié ces deux représentations. « On n’y vient pas pour se déchaîner sur la piste de danse : ces performances portent plutôt à la rêverie et à l’introspection », observe-t-elle.

 Stéphanie poursuivra son cursus de maîtrise en septembre, sous la direction de M. Bernier. Celui-ci explique que le passage de l’étudiante par le DESS en musiques numériques a ensuite permis à cette dernière d’intégrer le programme de maîtrise, car elle n’avait jusque-là pas fait d’études formelles en musique. Stéphanie présentera également Scanner Me, Darkly à Lima, au Pérou, le mois prochain.