Testez votre orthographe avec Luc Ferrandez !

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Par Leslie Doumerc
mercredi 29 septembre 2010
Testez votre orthographe avec Luc Ferrandez !

À l’occasion des journées de la culture, une quarantaine de Montréalais se sont prêtés au jeu de la dictée de Luc Ferrandez. Quartier Libre vous propose de tester à votre tour vos talents en orthographe à travers ce texte mordant, écrit par le maire de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal. Le défi : faire moins de huit fautes, score de votre rédactrice en chef.

La chipie

Ah misère, ah malheur. Quel terrible cauchemar! Il me faut encore passer par la ruelle au bout de laquelle réside mademoiselle Tartempion – vague cousine, si j’en crois son apparence, de la Castafiore. Cachée derrière ses horribles rideaux à pois, flanquée de son cabot plein de puces, la vilaine créature m’attend très certainement avec ses éternels bigoudis, son affreuse robe de chambre (achetée en mille huit cent quatre-vingts) et son rouleau à pâte sous le bras pour me menacer de quelques coups non mérités.

Tous les matins elle m’interpelle de son ton mielleux, sous prétexte de me dire bonjour. Dès que j’arrête, elle monte sur ses grands chevaux et me balance au visage tous les problèmes du quartier. Ah l’affreuse chipie !

Quelle mauvaise foi, quelle subjectivité ! À l’entendre, tout était parfait avant mon arrivée : jamais avait-on vu les moindres nids-de-poule, il y avait du stationnement à profusion, les poubelles étaient discrètes et bien rangées et les quelques problèmes qui surgissaient ça et là, quelle que soit leur ampleur, étaient vite réglés. Tandis qu’aujourd’hui, n’est-ce pas, tout a changé. Les parcs sont de véritables guet-apens ; une foule grandissante de sans-abri se fait fort de lui faire peur à tout moment ; nos fonctionnaires sont des rabat-joie qui n’ont pas l’heur de lui plaire ; on a phagocyté son jardin à force de planter des espèces de fruits charnus pleins de follicules et de drupes ; l’immonde voisin du dessus a renversé sur son balcon son seau de lombricompostage ; le puîné de la famille d’en face lui fait des grimaces les soirs de pleine lune et que saisje encore. Mais tous n’ont qu’à bien se tenir parce qu’elle s’enhardira un jour et leur fera ravaler leur gouaille, leurs mille brocards, leurs pieds de nez et leurs quolibets.

Perdu dans mes pensées, j’approchais dangereusement du repaire de la sorcière quand j’aperçus une ambulance dans la cour. Le chien était caché sous le balcon, bien silencieux. La dame était morte – trop déçue sans doute de l’incurie de notre administration. Hébété, privé de la routine habituelle, j’arrivai au travail avec une demi-heure d’avance. Tout était fermé. Tout était sombre et triste.