Rire pour mieux s’unir à l’UdeM

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Par Vanessa Mounier
mardi 24 janvier 2012
Rire pour mieux s'unir à l'UdeM
(Crédit : uMontrealmemes)
(Crédit : uMontrealmemes)

Avec près de 190 000 visites et 850 mentions J’aime sur Facebook en 20 jours, uMontrealmemes.com séduit de plus en plus d’étudiants en mal d’humour. Grâce à un mélange d’humour satirique et de sarcasme, le site tourne en dérision des sujets tels que la nourriture de Chez Valère ou la propreté des toilettes à Marie-Victorin. Le co-créateur, qui a voulu se faire appeler Brad pour garder l’anonymat, revient sur ce succès inattendu.

Quartier Libre : Comment fonctionne le site Internet uMontrealmemes.com ?

Brad : Les mèmes sont des personnages ou des paysages dessinés ou photographiés sur lesquels on colle un message. On les fait parler sur différents sujets concernant l’Université. Il y a divers acteurs: celui qui est toujours frustré, celui qui est toujours triste, celui qui se sent seul. Il existe donc un mème pour chaque gamme d’émotion et de sentiment. Les mèmes servent à représenter les choses de la vie quotidienne, ce qui nous arrive au jour le jour de façon concrète, mais sous un angle humoristique. Nous sommes souvent confrontés à des toilettes qui sentent mauvais à Marie-Victorin, au mauvais café de Jean-Brillant, aux désagréments du portail étudiant…

 

(Crédit : uMontrealmemes)

 

Q.L. : Comment vous êtes-vous lancés dans un tel projet ?

B.: L’idée est née à Noël, lors d’une discussion avec un ami d’Ottawa sur les mèmes en général et principalement sur ceux de McGill, la première université qui a lancé un tel site, le 15 décembre dernier (McGillMemes.tumblr.com). Nous avons repris quelques-uns de leurs mèmes que nous avons d’abord traduits, un processus délicat car il fallait en préserver l’humour satirique. Le but était de les adapter aux situations rencontrées à l’UdeM et ainsi de créer, grâce à l’humour, un sentiment d’appartenance à notre communauté udemienne. C’est une chose déjà pré- sente à McGill, où les étudiants ont une cohésion universitaire beaucoup plus importante. Cela nous prend beaucoup de temps de gérer le site Internet: recevoir les courriels des étudiants, leur répondre, poster les nouveaux mèmes… Le site a vu le jour le 5 janvier seulement et la cadence de publication est de huit mèmes par jour. C’est incroyable! Nous sommes agréablement surpris du succès soudain que le site suscite.

Q.L. : L’UQAM est pour vous un «beau cégep». Quel rapport entretenez- vous avec les autres universités ?

B. : L’humour « anti-UQAM » est de bonne guerre. Notre mème le plus célèbre est « on n’a rien contre les gens de l’UQAM, c’est un beau cégep ». L’UQAM, quant à elle, nous définit comme une « université de régions» sur son site. Il n’est pas question ici de d’inciter à une rancœur collective envers les universités voisines. Il s’agit surtout d’une tentative de définition d’identité udemienne plutôt que d’un mépris interuniversitaire. Nous communiquons d’ailleurs beaucoup entre créateurs de sites de mèmes de l’UQAM, de McGill et de l’Université de Sherbrooke. Je suis piqué dans mon orgueil, car le site uLavalmemes a été salué par plus de 1 000 mentions J’aime en seulement une journée.

Q.L. : Pourquoi garder votre anonymat alors que les créateurs des autres sites ont rendue publique leur identité ?

B.: C’est un choix de notre part, pour deux raisons. D’abord, on ne sait pas si la direction de l’UdeM a l’épiderme sensible. Il s’agit de quelque chose qui échappe au contrôle du Bureau de la communication. Ensuite, ce n’est pas dans notre intérêt d’être connus. Ce sont les contributeurs qui donnent vie au site. Ce sont désormais les udemiens à l’imagination fertile qui donnent le spectacle. C’est beau à voir. On garde tout de même un œil sur les mèmes que l’on reçoit par courriel. En ce sens, on peut dire qu’on censure puisque le but est de garder cet esprit bon enfant et non pas de transformer ça en quelque chose de politique, en vengeance personnelle ou en méchanceté gratuite.

 

 

D’où viennent les mèmes ?

Le terme «mème» a été créé par Richard Dawkins en 1967. Il vient du français « même » et de l’anglais « meme », qui découle du grec mimeme, qui signifie « imiter ». À l’instar des gènes, unité de base de l’évolution de l’homme, les « mèmes » seraient l’unité d’évolution de la culture d’une civilisation.

Plus exactement, un « mème » Internet met en scène un personnage ou un paysage récurrent, auquel l’auteur associe un message différent selon la situation dont il veut se moquer. Sous forme d’image ou de vidéo, le mème se diffuse massivement sur Internet. Ainsi, certains « mèmes » ont pour origine des vidéos Internet comme celui de la chanteuse Rebecca Black, devenue malgré elle le symbole de la chanson niaise.

Richard Dawkins parle de réplication culturelle, c’est-à- dire de la culture diffusée par imitation. L’idée de réplication prend forme dans l’utilisation répétitive d’une même image avec un message chaque fois différent.

C’est surtout l’occasion pour les internautes de tourner en dérision des situations de la vie de tous les jours : le goût du café dans les cafétérias, le retard dans la remise des notes… Les sites Memebase.com ou Quickmeme.com se sont vite imposés comme références en matière d’humour estudiantin dont les blagues ont démarré sur Internet. Particularité de ces sites Internet, ce sont les utilisateurs qui en créent le contenu. La diffusion se fait ensuite en masse à partir des plateformes de réseaux sociaux tels que Twitter et Facebook.

Enclenché par l’Université McGill en décembre dernier, le mouvement s’est répandu comme une traînée de poudre dans les universités du Québec. À ce jour, l’Université de Montréal, l’UQAM et l’Université de Sherbrooke ont toutes leurs sites satiriques. Les « mèmes » connaissent un tel succès que le réseau social Google + a créé récemment une application permettant d’ajouter du texte sur les images téléchargées sur la plateforme.

Cyril L’Allinec