Où en sont la parité et la diversité dans les représentations audiovisuelles ?

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Par Romeo Mocafico
mercredi 31 octobre 2018
Où en sont la parité et la diversité dans les représentations audiovisuelles ?
Organisé par Lori Saint-Martin et Julie Ravary-Pilon, le colloque est issu d'un partenariat avec l'UQAM (Courtoise Jean Pierre Lefebvre / Q-bec my love, 1969)
Organisé par Lori Saint-Martin et Julie Ravary-Pilon, le colloque est issu d'un partenariat avec l'UQAM (Courtoise Jean Pierre Lefebvre / Q-bec my love, 1969)
La chargée de cours à l'UdeM Julie Ravary-Pilon a organisé la semaine dernière à la Cinémathèque québécoise le colloque « Être femme dans les médias audiovisuels au Québec : cinéma, télévision, jeux vidéo et Web ». Pendant trois jours, elle est revenue sur le manque de parité et de diversité dans le paysage médiatique au sein de la province.

S’interroger sur la place des femmes dans les récits et sur la représentation qu’en font ces quatre médias, telles ont été les pistes de réflexion soulevées lors de cet événement.

Montrer autre chose

D’après la stagiaire postdoctorale à l’UQAM, la plupart du temps, l’image des femmes reflétée par le cinéma, le Web, la télévision ou les jeux vidéo ne correspond pas forcément à la réalité. Pour celle qui est également chargée de cours au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques, la question ne concerne pas uniquement la parité, mais également la diversité. « On s’est rendu compte que l’offre était souvent blanche et hétérosexuelle, expose-t-elle. La télé québécoise ne représente pas nécessairement ce que tu vois quand tu te promènes dans les rues de Montréal, en termes de diversité culturelle et sexuelle. »

L’un des objectifs des participants à ce colloque a été d’encourager la visibilité de ceux que l’on montre moins. « Notre travail est d’aller chercher des représentations marginalisées, pour justement montrer qu’il y a autre chose, précise-t-elle. C’est ce qu’on essaye de faire de plus en plus, et pas uniquement avec ce colloque-là. »

La diversité à l’épreuve des perceptions

Julie cite la théorie de l’hégémonie dominante pour expliquer cette sous-représentation.

https://soundcloud.com/user-535983937/julie-ravary-pilon-les-identites-privilegiees-dans-les-representations-mediatiques

La raison avancée par celle qui travaille au Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises (CRILCQ) pour justifier ces actes est souvent la peur, pour ces producteurs, de perdre leur public. Elle ajoute que ces agissements peuvent être remis en cause par les nombreux succès audiovisuels mettant en scène des personnages que l’on ne présente pas souvent au cinéma ou à la télévision.

La parité par la politique

La doctorante pense que les mouvements de contestation et de mobilisation que l’on retrouve depuis plusieurs années, qui encouragent notamment la parité au sein de la société, favorisent l’adoption de politique allant dans ce sens dans le milieu audiovisuel.

https://soundcloud.com/user-535983937/julie-2-vf

Selon Julie Ravary-Pilon, ces mobilisations poussent les institutions culturelles telles que l’Office national du film du Canada (ONF), la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) et Téléfilm Canada à évoluer dans la bonne direction. Elle évoque notamment l’attribution des budgets de 2016-2017 comme une grande avancée pour la représentation paritaire dans les institutions publiques*.

Le Web, terreau de diversité

Lorsqu’elle se penche plus précisément sur les quatre types de médias évoqués au cours de ce colloque (cinéma, télévision, Web et jeux vidéo), elle observe que certains se prêtent mieux aux exercices de la parité et de la diversité dans leurs productions.

Le Web, notamment par l’intermédiaire de ses séries télé exclusivement destinées à être diffusées en ligne, se démarque grâce à des contenus jeunes, moins dispendieux et des formats plus courts. Autant de facteurs qui favorisent une représentation plus large de personnages féminins pour la jeune femme. « Finalement, on peut remarquer une chose : plus ça coûte cher à produire, plus l’objet audiovisuel risque d’être blanc et hétérosexiste, note-t-elle. Le Web est donc beaucoup plus inclusif (que les autres types de médias) de ce point de vue là. »

En ce qui concerne le monde cinématographique, Julie aborde la question de la représentation des personnages féminins dans son nouveau livre Femmes, nation et nature dans le cinéma québécois. L’auteure revient spécifiquement sur les figures féminines dans le cinéma québécois.

* D’après les chiffres de l’organisme à but non lucratif Réalisatrices équitables, la part des projets proposés par des réalisatrices et acceptés par la SODEC (sur la période 2013-2016) était de 31,4 %. Ce ratio a par la suite augmenté pour atteindre 35 %, à la suite de mesures prises en vue de la parité (sur la période 2017-2018). Pour les productions de Téléfilm Canada, les chiffres sont passés de 20 % à 44 % sur les mêmes périodes.