Odd Future Wolf Gang Kill Them All : le rap des enfants perdus

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Par Justin D. Freeman
mardi 19 avril 2011
Odd Future Wolf Gang Kill Them All : le rap des enfants perdus

Ils sont une dizaine de gamins entre 16 et 21 ans. Ils rappent, ils skatent et « n’ont rien à foutre » de quoi que ce soit. Ils forment le Odd Future Wolf Gang Kill Them All (OFWGKTA). Élevés au rang de superstars depuis leur passage au Late Night with Jimmy Fallon en février dernier, ces ados de la banlieue de Los Angeles pratiquent un rap halluciné entre sexe, drogues et animaux imaginaires.

« Avec un peu de chance, [dans le futur] on contrôlera la musique dans son ensemble, le skate dans son ensemble. Ah, et je veux une putain de grosse télé pour pouvoir bouffer des toasts à la cannelle en regardant Flapjack*. Et une licorne. Je l’appellerai Steve. Steve la tortue. » En interview pour Vice Magazine, Tyler, The Creator, fondateur du collectif OFWGKTA, ne cache pas ses ambitions : emmener le gang au sommet… et passer le restant de ses jours à vivre comme un ado.

Le parcours du OFWGKTA est stupéfiant. Leur première télé ? NBC. Leur première scène ? Le Webster Hall à New York : un spectacle à guichets fermés en seulement 48 heures et dont la foule comptait des personnalités telles que Mos Def ou le groupe Das Racist. Depuis ils ont aussi joué au SXSW et au Coachella, partageant l’affiche avec Kings of Leon, The Strokes ou Kanye West.

Pourtant, depuis 2007, l’histoire du Wolf Gang se construit dans de simples chambres de jeunes américains moyens de banlieue, avec un blogue comme seul moyen de diffusion. Sur oddfuture.tumblr.com on retrouve d’ailleurs une douzaine de mixtapes, mises à disposition gratuitement.

La marque de fabrique du OFWGKTA est plutôt reconnaissable : les bases instrumentales minimalistes maison sont associées à des paroles inspirées par une réalité inquiétante et un imaginaire foisonnant. Les gamins crachent dans la soupe, ou les soupes devrait-on dire : tout le monde en prend pour son grade. Tout le monde, sauf leurs mamans. Ils haïssent viscéralement leurs paternels pour la plupart, insultent ceux qui n’aiment pas le bacon, s’autoproclament même « Bacon Boys » et détruisent ces « rappeurs quarantenaires qui rappent à propos de Gucci ». Ils se droguent, boivent, font l’apologie de la violence et évoquent même des orgies sexuelles avec des tricératops !

Encore étudiants pour la plupart — certains sont même mineurs —, les membres du Wolf Gang fascinent les blogueurs de 12 ans comme les critiques de 40. D’ailleurs, en début d’année, Tyler, The Creator a réussi à arracher un contrat à l’étiquette XL Recordings (M.I.A. et Radiohead) et sortira, en mai prochain, son premier véritable disque : Goblin.

La fin de la liberté d’expression totale pour ce grand bonhomme noir aux oreilles imposantes et au short permanent ? Rien n’est moins sûr. Le clip de son premier single, Yonkers, le met en scène dans une fabuleuse allégorie de l’industrie musicale. On y voit Tyler apprivoiser un cafard, le manger, le vomir et finir par se pendre. Tout un plan de carrière.

* Flapjack : Dessin animé américain