Moderniser l’Église : une contradiction en soi

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Par Eric Deguire
mardi 26 février 2013
Moderniser l’Église : une contradiction en soi
(Crédit illustration: Mélaine Joly)
(Crédit illustration: Mélaine Joly)

À la suite de la démission abrupte du pape Benoît XVI, plusieurs ont fait un appel à la modernisation de son poste et de l’Église catholique. On parlait du désir de voir un plus jeune Pape avec des idées plus réformistes. Pourtant, n’est-il pas contradictoire de vouloir moderniser l’Église catholique? La religion n’est-elle pas traditionnelle et conservatrice par définition ?

 Le catholicisme ne jouit  plus de l’emprise qu’il avait sur ses ouailles ni  de la popularité qu’il a déjà connues. Au Québec, le déclin de l’influence de l’Église sur la population est remarquable depuis une cinquantaine d’années. Et ce déclin du catholicisme est bien répandu. Même que, dans plusieurs sociétés d’Amérique latine, le nombre de personnes qui se déclarent sans religion est en croissance.

 Le phénomène de la laïcisation est intimement lié au moment où une société se modernise. À la suite de ce phénomène, la religion devient une affaire privée. La laïcisation a souvent mené à un déclin du nombre de pratiquants, comme ça a été le cas au Québec.

 Ce déclin peut être dû aux positions très conservatrices de l’Église catholique. Les effets de la modernisation et des valeurs issues de la philosophie libérale peuvent aussi en être la cause. La glorification individuelle qui est si présente dans notre culture amène plusieurs individus à accorder peu d’intérêts aux pratiques, aux rituels et aux contraintes imposés par l’Église catholique ou par toute autre religion.

 Ainsi, un appel à la modernisation de l’Église catholique serait contraire au sens même de la modernisation. De plus, si l’Église décidait de se lancer dans un tel projet, elle perdrait complètement la face. Le pape et l’Église ne devraient pas se soumettre à un concours de popularité. L’Église catholique ne devrait pas avoir comme mandat de recueillir le plus grand nombre possible de membres simplement pour s’en vanter.

 On peut dire ce qu’on veut de la valeur des positions de l’Église catholique sur la contraception, l’avortement ou sur les gais. Mais les visions de l’Église sur ces questions sont partagées par près d’un milliard de catholiques et des pratiquants d’autres religions dans le monde.

 Même si le catholicisme connait un déclin, il n’est pas dans un si mauvais état. La religion catholique compte encore de nombreux pratiquants dans tous les pays, notamment en Amérique latine, en France, en Espagne, en Italie et aux États-Unis où ils sont 74 millions. 

 Mais peu importe le nombre de ses pratiquants, l’Église se doit de demeurer authentique à ce qu’elle croit. Donc, si les positions de l’Église catholique sont ultraconservatrices, il n’y a pas de possibilité de modernisation. Demander à l’Église de se moderniser serait comme demander à l’État de la Cité du Vatican de se laïciser. Ultimement, ce n’est pas l’Église qu’il faut moderniser, mais bien la société. Les sociétés du monde qui sont encore sous l’emprise de la religion doivent  se laïciser et  se moderniser en rendant la religion une question personnelle.