Après être montée sur scène avec une dizaine d’ensembles baroques et avoir participé à l’enregistrement d’une vingtaine de disques, la musicienne Mélisande Corriveau présente son récital de fin de doctorat le 6 septembre prochain à la salle Claude-Champagne de l’UdeM. Malgré son expérience, elle est un peu stressée. Rencontre avec une artiste qui maîtrise la viole de gambe, une cousine du violoncelle.
Ce récital n’est pas un concert comme les autres pour la gambiste. «Il s’agit d’une performance en solo et les récitals sont jugés, ce qui rend la situation artificielle, admet-elle. La préparation est très différente de ce à quoi je suis habituée. Je vais devoir accorder beaucoup de rigueur à certains détails, comme l’ornementation, qui peut être jugée de façon très pointue.» Un ornement est une note qui s’ajoute à une partition sans modifier la mélodie.
Mélisande Corriveau jouera du pardessus de viole lors de son récital, soit le plus petit instrument de la famille des violes de gambe, qui était autrefois réservé aux femmes. «Mon projet de doctorat a été de cataloguer tout ce qui avait été écrit pour le pardessus de viole, explique la doctorante. J’ai trouvé un répertoire qui s’étend de 1722 à 1800.» Accompagnée au clavecin par le newyorkais Eric Milnes – chef et interprète lors de plusieurs festivals de musique ancienne –, elle présentera des oeuvres de compositeurs baroques français tels que Caix d’Hervelois, Barrière, de Blainville, Blavet et Buterne.
Un parcours tortueux
Initiée à la flûte à bec à six ans, la musicienne se fait remarquer assez tôt lors d’un concours, et ses professeurs suggèrent à ses parents qu’elle persévère dans cet instrument. Conseil qui l’amène à suivre un baccalauréat en flûte à bec. Mais cet instrument ne lui suffit pas. «J’ai alors appris le violoncelle baroque pour pouvoir accompagner ma soeur harpiste », dit-elle. De là à apprendre la viole de gambe, il n’y a qu’un pas, qu’elle franchit à la maîtrise où elle perfectionne sa technique auprès de Margaret Little, directrice de l’Atelier de musique baroque à l’UdeM depuis 1992.
Pendant sa maîtrise, Mélisande Corriveau est invitée à joindre le Consort des Voix humaines, un ensemble de violes de gambe fondé par Margaret Little et Suzie Napper. Lors d’un enregistrement, l’ensemble a accès à une banque d’instruments dont deux pardessus de viole. À l’époque, aucune des gambistes n’était familière avec le pardessus. La musicienne est intriguée par cet instrument et décide de s’en faire confectionner un. «Quand je l’ai reçu, j’ai passé un certain temps à tenter de trouver comment l’accorder, avoue-t-elle. Je ne connaissais rien à ce type de viole.»
Créer son propre répertoire
N’ayant que très peu de répertoire sous la main pour le pardessus, l’artiste dépose un projet de recherche afin de cataloguer les oeuvres existantes pour cet instrument. Elle obtient une bourse du Fonds québécois pour la recherche qui lui permet de retourner aux études et de s’envoler pour Paris. « J’ai passé plusieurs jours à la Bibliothèque nationale de France à recopier à la main les microfilms des partitions de pardessus, explique-t-elle. Quand je suis revenue au Québec, j’ai présenté le fruit de mes recherches en trois récitals qui correspondent aux trois périodes de composition du répertoire de pardessus.»
Peu d’interprètes ont la chance d’entamer une carrière de la sorte au terme du doctorat. « Je me considère très choyée, confesse-t-elle. Mes professeurs et mes pairs m’ont toujours incluse dans leurs projets, ce qui m’a permis de progresser très vite sur la scène musicale. » Dans le but de rendre la pareille aux autres musiciens, elle a créé l’ensemble musical L’Harmo – nie des saisons, dont elle est la directrice artistique. «J’adore choisir mon propre répertoire», ajoute-t- elle.
Pour l’instant, Mélisande Corriveau se concentre sur son récital du 6 septembre prochain. Elle ne change pas son attitude pour la préparation du concert. «Je vais donner le meilleur de moi-même », promet-elle.
Récital de viole de gambe de Mélisande Corriveau
Faculté de musique, Salle Claude-Champagne
200, avenue Vincent-d’Indy
6 septembre, 20 heures
Entrée libre