L’impératif de s’écrire

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Par Marie-France Mercier
vendredi 10 octobre 2014
L’impératif de s’écrire
La couverture du roman
Crédit photo : Courtoisie Emmanuelle Poirier Saint-Georges
La couverture du roman
Crédit photo : Courtoisie Emmanuelle Poirier Saint-Georges
Le lancement du livre Une histoire de taxis d’ataxie ou La dernière illusion de l’étudiante en littératures de langue française à l’UdeM Emmanuelle Poirier St-Georges avait lieu le 26 septembre dernier. Dans ce livre, l’auteure révèle son expérience personnelle face à sa maladie, l’ataxie de Friedreich. Entre les lignes, elle dévoile aussi le pouvoir de l’écriture. Mais quelles sont les limites à parler de soi et de ses sentiments?

Emmanuelle Poirier St-Georges a connu un parcours pour le moins singulier. À l’âge de quinze ans, elle a reçu le diagnostic de la maladie de l’ataxie de Friedreich, une condition touchant une personne sur 2500 au Québec. Cette maladie dégénérative touche le système nerveux et cardiaque et provoque notamment des troubles moteurs. L’espérance de vie d’une personne ataxique est d’environ 35 ans.

En dépit de sa maladie, Emmanuelle a fait une maîtrise en sciences biomédicales à l’UdeM, s’intéressant de près à la compréhension de sa propre condition, notamment par le biais de la génétique. « Et, j’ai un coup de foudre pour mon cours […] de génétique, écrit-elle dans La dernière illusion. Je jure que mon cœur en a que pour cette matière qui en plus titille ma curiosité, car elle me touche personnellement, enfin ma maladie… »

En 2011, Emmanuelle Poirier, toujours attirée par la lecture et l’écriture, a changé de cap et a entrepris son baccalauréat en littératures de langue française.

L’appel de l’écriture

La jeune auteur reconnaît la force des mots et leur pouvoir évocateur dans son combat contre la maladie, d’où les multiples recours à la citation. Les références littéraires traversent l’entièreté de La dernière illusion : Baudelaire, Arcan, Duras, Rousseau ou encore Laberge prennent place dans le livre. « Est-ce que Victor Hugo avait raison dans sa me?taphore quand il disait que les fruits ne poussent jamais sur les branches trop faibles pour les porter ? » peut-on lire dans le roman.

À l’insertion de références, on peut ajouter l’insertion de pensées intérieures et de poèmes. Tout cet ensemble constitue au final un collage, tantôt justifié par rapport aux sentiments évoqués, tantôt gauche au regard certains liens douteux.

Écrire pour soi   

« Écrire m’a toujours tenté. J’ai toujours écrit à travers les années, car, pour moi, écrire, c’est me décharger de l’émotion qui me traverse », confie-t-elle en entrevue. Dans son livre, le pouvoir libérateur de l’écriture se confirme. « Les poèmes que j’ai écrits et qui vont suivre peuvent paraitre désespèrés, voire suicidaires, dit cette dernière. Mais j’écris pour me libérer, quand tout va mal »

L’auteure voit en le médium de l’écrit une façon de se retrouver elle-même et d’exprimer sa personnalité telle qu’elle la conçoit, elle, c’est-à-dire sans le filtre de la maladie. Elle écrit sur son « caractère de feu » et évoque la dualité de sa personnalité. « Un côté masculin, actif, volontaire, indépendant, leader, arrogant, et un côté féminin passif, doux, timide, un peu pessimiste », décrit celle-ci.

La dernière illusion est alors davantage un récit de sentiments et de croissance personnelle qu’un récit articulé autour de la maladie ou des événements de la vie. Le style du livre tangue entre le lyrisme et un ton familier, mais est indubitablement alourdi par un trop-plein de sentiments (frustration, chagrin, sentiments de perte et d’injustice). Au reste, les sentiments communiqués permettent de mieux comprendre la condition propre à l’auteure et son quotidien.

Traversé d’ombres et d’éclaircies d’espoir, La dernière illusion est un récit qui incite à la réflexion quant à la chance d’être en santé et à l’acceptation de soi malgré les différences.