Les lendemains de veille

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Par Eric Deguire
mardi 9 avril 2013
Les lendemains de veille
(Crédit photo : Flickr/Saitor)
(Crédit photo : Flickr/Saitor)

À chaque numéro, Quartier Libre offre la chance à un de ses journalistes d’écrire une nouvelle de 500 mots sur un thème imposé. Le thème de ce numéro est : la bière.

La neige avait encore une fois rempli les rues de Montréal, mais l’enthousiasme des vendredis soirs était au rendez-vous. Je rentrai de l’école et je rencontrai mes amis. Nous allâmes souper : quoi de mieux pour commencer une fin de semaine qu’un burger et une bière au McCarold’s ?

Après un réchauffement de quelques pintes, nous nous apprêtâmes à nous rendre au party. Nous sortîmes du pub et nous nous arrêtâmes un bref moment au Couche-Tard du chemin de la Côte-des-Neiges. La vingt-quatre de Sleeman s’imposa rapidement. Ce devait être assez pour quatre hommes qui avaient déjà pris quelques verres. Surtout que nous allions fort probablement recevoir des shooters anonymes une fois sur place.

Arrivés sur les lieux des festivités, un merveilleux appartement du Plateau Mont-Royal et ses chaleureux fêtards nous accueillirent. Comme j’avais l’habitude de le faire, j’entrai en faisant un coup d’éclat. Je lançai un bruyant « Hey ! » dès que j’eus franchi la porte.

C’était la jeune vingtaine, la magie des années universitaires où tout semblait possible. Nous allions dans des partys de ce genre et nous pouvions parler à tout le monde. Nous pouvions nous immiscer dans n’importe quelle conversation qui pouvait porter sur des sujets aussi variés que l’élection d’un nouveau pape, les sitcoms des années 1990 ou les chances des Canadiens de Montréal en séries.

L’inventaire de bière semblait inépuisable et les shooters de rhum que je me faisais offrir servaient d’assurance. Mais, quelque part entre minuit et une heure du matin, ce fut la grosse panique : il allait peut-être manquer de bière !

Je sondai rapidement mes compatriotes quant à la quantité de bière qu’ils avaient encore l’intention de consommer. Ils me dirent qu’ils n’allaient pas en prendre beaucoup plus et que tout devrait être correct. À la suite de cette gestion de crise, je me relançai dans l’environnement festif, l’esprit en paix, sachant qu’il y aurait assez de bière. Je continuai à jaser et je flirtai un peu trop sans le savoir.

Les heures passaient, la musique nous rendait heureux, de Jean Leloup à Daft Punk, en passant par Arcade Fire, et les conversations se multipliaient. À un certain moment, j’étais indéniablement debout sur les tables en train de danser de manière beaucoup trop maladroite. Et, quelques instants plus tard, je livrai un chant un peu envahissant de Sensualité d’Axelle Red.

Enfin, c’était le temps de partager les histoires délirantes. Je donnai beaucoup trop de détails sur ma dernière conquête amoureuse éphémère, mettant fin à toute chance d’en réaliser une autre ce soir-là. Lorsqu’on m’imposa de partir, on m’obligea à emprunter la porte, alors que je m’alignais vers la fenêtre.

Et ce furent mes derniers souvenirs. Je me réveillai sans trop de blessures de guerre, mais je ne savais pas trop comment j’étais rentré à la maison. Je portais encore mes souliers, toutefois mes chaussettes s’étaient enfuies.

 

Morale : même si l’on croit qu’il n’y aura jamais assez bière, on n’en manquera jamais non plus.