Légiférer sur la pratique

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Par Thomas Martin
lundi 20 novembre 2017
Légiférer sur la pratique
Une enquête de La Presse datée du 3 juillet dernier a mis en lumière de nombreux actes illégaux dans les cabinets de dentistes québécois. (Crédit photo : Pixabay I Skeeze)
Une enquête de La Presse datée du 3 juillet dernier a mis en lumière de nombreux actes illégaux dans les cabinets de dentistes québécois. (Crédit photo : Pixabay I Skeeze)
Certains dentistes forcent leurs assistants à pratiquer des actes illégaux, et ce, en toute impunité, selon une enquête de La Presse. Les assistants dentaires militent depuis des années pour une meilleure reconnaissance de leur profession.

L’article paru en juillet 2017* décrit de nombreux actes survenus dans des cabinets de dentistes où les hygiénistes et les assistants dentaires sont souvent tenus de poser des gestes illégaux. Bien qu’ils savent généralement comment poser ces actes médicaux, ils ne sont pas autorisés de le faire en vertu de la Loi sur les dentistes L’Association des assistant(e)s dentaires du Québec estime que 95 % des cabinets dentaires enfreignent quotidiennement la loi.

Le président de l’Association des étudiants en médecine dentaire de l’UdeM (AEMDUM) souhaite que les futurs dentistes reçoivent une formation en conformité avec les règlements qu’impose la profession. « Les étudiants de la FMD [Faculté de médecine dentaire] suivent des cours en matière de droit professionnel, indique-t-il. Je suis d’avis que les étudiants reçoivent la formation nécessaire à adopter des pratiques de délégation d’actes qui sont conformes aux lois et règlements professionnels en vigueur. »

Statu quo

La directrice des communications à l’Association des assistant(e)s dentaires du Québec, Renée Vaillancourt, déplore le manque d’avancées dans le dossier depuis les révélations de juillet dernier. « On n’a pas vu de changements pour le moment sur les démarches que nous avions entreprises, indique-t-elle. Nous souhaitons que les actes qui nous sont délégués par les dentistes soient légalement reconnus. »

Son regroupement milite depuis des années déjà pour que leur profession soit mieux reconnue, mais la situation pourrait prendre encore bien du temps à être réglée, selon Mme Vaillancourt. « Cela fait 25 ans que nous faisons des démarches, révèle-t-elle. J’ai du mal à dire que je suis confiante. » Cette impasse est notamment due à certaines demandes de légalisation d’actes faisant également partie du champ de pratique des hygiénistes dentaires. Cela entraîne des complications dans les négociations, aux dires de la directrice des communications.

Enterrer la polémique

Pour la professeure à la Faculté de médecine dentaire de l’UdeM Dre Elham Emami, il ne faut pas généraliser la situation. « L’article de La Presse se base sur le témoignage d’une seule dame, relève-t-elle. Ce n’est pas une enquête très approfondie. Je sais qu’il y a une supervision de l’Ordre des dentistes du Québec. Les dentistes suivent les règles, ils sont méticuleux. »

La Dre Emami concède que, comme dans tous les corps de métier, une petite portion de professionnels peut faire des erreurs. Néanmoins, la majorité des cabinets qu’elle connaît sont aux normes. Elle insiste sur la nécessité de minimiser cette polémique, afin d’éviter que les dentistes perdent la confiance des Québécois.

L’enquête souligne également la part de l’aspect financier dans l’équation. Les outils technologiques étant très coûteux, les dentistes confieraient des tâches aux assistants payés moins cher que les hygiénistes. « Le système de santé actuel, qui oblige les dentistes à être en secteur privé, nécessite d’avoir des bureaux souvent chers, ce qui engendre beaucoup de dépenses », soutient-elle.

Pour Mme Vaillancourt, le dossier reste assez sensible. L’Ordre des dentistes du Québec n’a pas souhaité répondre aux questions de Quartier Libre.