La tête ailleurs

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Par Leslie Doumerc
mercredi 29 septembre 2010
La tête ailleurs

J’ai une question pour vous.

Est-ce qu’un édito pourrait être une tribune appropriée pour sortir du placard ? C’est que je voudrais vous parler de mon amante. Celle qui enchante mes journées, celle qui ensorcelle mes nuits depuis maintenant près de trois ans. Sa beauté n’est pas visible au premier abord, mais il n’a pas fallu longtemps pour que son charme incroyable fasse toute la différence. Ma dulcinée a des centaines de milliers d’amoureux, ma dulcinée s’appelle Montréal.

On s’aime fort elle et moi, mais comme dans toute situation de couple fusionnel, je ne veux pas risquer l’étouffement. Alors souvent les fins de semaine, je quitte ma douce pour aller prendre l’air chez mes amies les Régions. Chez elles, l’herbe était plus verte, tout était plus calme, plus reposant. C’était avant qu’elles mettent au monde de drôles de rejetons. Depuis quelques années, des coopératives culturelles fleurissent un peu partout au Québec. Des sortes d’hybrides à mi-chemin entre la salle de spectacle, le cinéma et la brasserie artisanale redonnent le goût aux habitants de sortir le samedi soir. Allez faire un tour dans les coopératives culturelles de Lavaltrie, de Rimouski et de Matane (p. 13 et 14), vous verrez que ces petits coins émergents font preuve d’un dynamisme virulent, digne d’un entrainement chez Énergie Cardio.

Le plus fou dans tout ça, c’est que tout le monde semble y trouver son compte. Les villes, trop heureuses de faire parler d’elles en bien, sont généreuses au point de prêter des terrains pour installer ce genre d’initiative. Les fondateurs de coopératives s’épanouissent, faisant fi du modèle capitaliste dominant. Le traitement des employés est égalitaire et l’esprit d’équipe est fort : on se sert les coudes. S’ils mouillent leurs chemises, ce n’est certainement pas pour alimenter leurs actionnaires. Les profits leur sont redistribués ou servent à de nouveaux projets emballants. Quant aux artistes, ils sont ravis de pouvoir tester leurs nouvelles compositions et la réaction du public dans une salle à taille humaine. Enfin, les habitants, tous âges confondus, peuvent se nourrir de la crème culturelle sans allumer le moteur de leur voiture et avaler des dizaines de kilomètres. Pas de chicanes, une sorte d’échange « gagnant gagnant » plutôt rare au Québec lorsqu’il s’agit de culture.

Les régions ont donc de sérieux atouts que je ne suis pas la seule à avoir remarqués. Votre propre université aussi joue les infidèles ! Cet automne, près de 5 000 étudiants de l’Université de Montréal ont choisi d’étudier dans les campus régionaux. Mettons les campus de Laval et Longueuil à part (ce n’est pas vraiment ce que l’on peut appeler la région !), vous êtes près d’un millier à graviter autour des campus de Terrebonne (éducation et santé), de Saint-Hyacinthe (médecine vétérinaire), de Saint-Hippolythe (biologie) et de Mauricie (médecine), sans oublier la splendide région de Mégantic (fouilles archéologiques et observatoire du Mont-Mégantic).

Pas de doute, ça bouge en région !