La somme des situations uniques

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Par Etienne Galarneau
jeudi 16 novembre 2017
La somme des situations uniques
(Photo: Wikimedia Commons | Mark Meid)
(Photo: Wikimedia Commons | Mark Meid)
À quel moment un cas isolé n’en est plus un ?

Au début du mois d’avril 2017, dans un local d’association étudiante au pavillon Lionel-Groulx, une exécutante est victime d’une agression par un individu se faisant passer pour un membre de son asso. On parle alors d’un cas isolé, traité par la Direction de la prévention et de la sécurité (DPS), puis par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Un courriel est envoyé par la FAÉCUM le 4 avril pour donner quelques précautions aux différentes associations étudiantes du campus. L’information reste à l’interne.

Quartier Libre apprend l’information au mois d’octobre 2017. On nous rappelle qu’il s’agit d’un cas isolé et que le campus est sécuritaire.

Moyens utilisés

Je ne doute pas du bon travail de la DPS et l’honnêteté de la FAÉCUM ou de la direction de l’UdeM sur ce genre de dossier. Cependant, à quel moment doit-on avertir la population étudiante de ces cas isolés ?

Le courriel de la FAÉCUM est envoyé aux associations étudiantes. On y rappelle le numéro de la sureté de vérifier que le téléphone est fonctionnel. Il y est également suggéré que les exécutants doivent faire leur permanence par groupe de deux.

Les associations étudiantes savent peut-être comment réagir à ces situations, sauf qu’il faut garder en tête que leurs exécutants ne constituent pas l’entièreté des étudiants.

En février dernier, une série d’entrées par effraction a eu lieu dans des salles de travail du pavillon Marie-Victorin. L’UdeM a rapporté à l’époque que des mesures seraient prises pour augmenter la sécurité dans ce pavillon sur une courte période. Il s’agissait là de locaux de laboratoire.

Les mesures recommandées par ce courriel sont-elles transmises à tous les membres d’une session à l’autre ? Peut-on garantir que tous les étudiants soient mis au courant ?

Dire ou taire

Personne ne doit se sentir en danger sur le campus. Or, qui peut garantir si une future « agression isolée » aura lieu ? Et si elle a lieu, qu’elle sera à l’endroit de l’exécutant d’une association, qui est près d’un téléphone et qui connaît les précautions transmises officieusement par la Fédération ou la direction ?

La victime de l’agression du mois d’avril a demandé l’anonymat, ce qui a sans doute aidé à ce que l’information circule peu. On peut néanmoins taire le nom d’une personne sans cacher sous le tapis les évènements.

Tout évènement ne suscite pas un grand tapage médiatique. Tout ne mérite pas que l’on déchire sa chemise en public en défendant que le campus est une jungle, un territoire sauvage où le Talion est texte de loi.

Mais peut-être que la meilleure conscientisation vient d’une reconnaissance globale des problèmes. Les agresseurs potentiels ne sont probablement pas rejoints par un avertissement de mesures de sécurité à prendre auprès des victimes.

Tandis qu’on discute des agressions au sens large, j’ai une admiration pour la conscientisation qu’a prise la communauté de l’UdeM depuis quelques années. La réponse aux allégations d’intoxication au GHB dans le cadre de fêtes universitaires à l’automne 2012 est une grande campagne a été lancée, intitulée « Surveille ton verre ».

Quatre ans plus tard, le regard s’est tourné de la victime à l’agresseur avec « Sans oui, c’est non ! ». Peut-être, au fond, qu’en parlant toujours de cas isolés et en les taisant, on reporte la faute ailleurs. On l’a fait auparavant, on peut le refaire aujourd’hui.

À prendre le message comme il est véhiculé, on croirait que les agressions sur le campus arrivent si rarement qu’il ne vaut pas la peine de s’en soucier. Pourtant, il serait préférable qu’elles n’arrivent jamais. Leurs itérations nous permettraient ainsi de nous demander comment, en tant que communauté, nous pouvons nous assurer que toutes et tous se sentent bel et bien en parfaite sécurité.

Etienne Galarneau