La France fait pencher la balance

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Par Karina Sanchez
vendredi 5 septembre 2014
La France fait pencher la balance
Le coût élevé de la vie dans les grandes villes et la difficulté d'être admis dans les grandes écoles font partie des facteurs qui découragent les étudiants québécois de faire le voyage en France.
Crédit : Isabelle Bergeron
Le coût élevé de la vie dans les grandes villes et la difficulté d'être admis dans les grandes écoles font partie des facteurs qui découragent les étudiants québécois de faire le voyage en France.
Crédit : Isabelle Bergeron
Près de 10000 Français étudient chaque année au Québec, alors que seulement 1 500 Québécois font le trajet inverse. C’est en partie à cause de ce débalancement que le gouvernement libéral souhaite réviser l’entente France-Québec en matière d’éducation prochainement. Mais comment expliquer cet énorme écart ?
« Les Québécois qui quittent pour la France visent d’abord Paris. Mais on le sait, les loyers sont chers, et le coût de la vie l’est aussi» Steven-Paul Pioro, porte-parole des Offices jeunesse internationaux du Québec

La reconnaissance des acquis est un des facteurs déterminants dans le choix de la destination d’études des jeunes Québécois. «J’ai choisi de faire mes études à Ottawa parce que je souhaitais être certaine que mon diplôme allait être reconnu», estime la candidate à la maîtrise en orthophonie Anne Whissel.

De ce fait, terminer un programme à l’extérieur du pays n’est pas monnaie courante chez les Québécois. «Le diplôme de l’UdeM, par exemple, est reconnu mondialement, fait valoir la responsable du Bureau des étudiants internationaux de l’UdeM, Valérie Mercier. Pour leur part, les diplômes des universités régulières de France n’offrent pas la même reconnaissance internationale.» Pour un diplôme français qui détient beaucoup de prestige, il faut viser les grandes écoles européennes, à son avis. «Il faut faire plusieurs tests afin d’être accepté, elles sont donc moins accessibles», précise-t-elle.

Selon le porte-parole des Offices jeunesse internationaux du Québec, Steven-Paul Pioro, les destinations prisées sont également sujettes aux modes. «Il y a quelques années, la France était très en demande, signale-t-il. Maintenant, les Québécois se tournent davantage vers les États-Unis et l’Amérique du Sud.»

Le coût élevé de la vie en Europe semble être un facteur qui décourage les Québécois. « Les Québécois qui quittent pour la France visent d’abord Paris. Mais on le sait, les loyers sont chers, et le coût de la vie l’est aussi, rappelle Steven-Paul Pioro. La situation est différente en Amérique du Sud ». Selon lui, cela explique aussi pourquoi ceux qui choisissent la France optent de plus en plus pour de grandes villes plus abordables, comme Lyon ou Bordeaux.

Malgré les peurs de certains, 25% de 400 étudiants de l’UdeM qui partent en échange annuellement optent pour la France. « La France demeure un choix populaire chez les étudiants, note le conseiller à la Maison internationale de l’UdeM, Guillaume Sareault. Elle reste la mère patrie, et c’est avec ce pays que nous avons signé le plus d’ententes.»

Le fait de pouvoir y étudier dans sa langue maternelle rend la France populaire aux yeux des Québécois, mais tous n’optent pas pour l’Europe. Ancienne étudiante de l’UdeM en enseignement du français langue seconde, Ève Giard est allée, en 2006, à l’île de la Réunion, une région d’outre-mer appartenant à la France. «L’île semblait être le meilleur des deux mondes, dit-elle. On y parle français, et c’est relax à cause de ses paysages et de son exotisme.» Elle cherchait à s’immerger dans un territoire français, mais qui était distinct du classique qu’est Paris.

Une arrivée massive

Si peu de Québécois choisissent d’étudier en France pour diverses raisons, le voyage inverse est lui très populaire. «La rareté des emplois en France est aussi une raison qui contribue à l’immigration massive des Français», explique la responsable du Bureau des étudiants internationaux de l’UdeM, Valérie Mercier.

L’étudiante en année préparatoire Marianne Kone, âgée de 28 ans, est venue à Montréal, car le système d’éducation est plus souple qu’en France, selon elle. « J’ai quitté parce qu’il n’y avait pas de perspectives d’avenir pour moi en ce qui a trait aux études universitaires, lance-t-elle. Là-bas, les assistés sociaux et le personnel de l’université me faisaient comprendre que j’étais trop vieille pour recommencer des études.»

Les déplacements nombreux du côté français sont aussi dûs à une population qui est plus dense. «On est huit millions au Québec, comparativement aux 60 millions d’habitants en France», indique Guillaume Sareault. Un débalancement démographique qui ne risque pas de s’estomper malgré une nouvelle entente.