Idée cherche argent

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Par Tahia Wan
mercredi 11 décembre 2013
Idée cherche argent
La plateforme de financement québécoise Haricot permet à des étudiants d’obtenir des fonds pour financer leurs projets. (crédit photo : Pascal Dumont)
La plateforme de financement québécoise Haricot permet à des étudiants d’obtenir des fonds pour financer leurs projets. (crédit photo : Pascal Dumont)

Monter un film, écrire un livre ou réaliser un projet de fin de session sont autant d’initiatives que des étudiants pourraient envisager de concrétiser. Toutefois, les fonds peuvent ne pas être suffisants. Il existe une méthode de financement participatif basée sur des dons publics : les plateformes de sociofinancement.

Le principe de ces plateformes est simple : un peu comme sur Facebook, chaque projet a son profil sur lequel sont détaillées toutes les étapes de réalisation, le budget assigné à chaque étape, des vidéos de présentation, le montant total des contributions en date du jour, le nombre d’ambassadeurs et d’alliés ainsi que la présentation du responsable du projet. Le profil est le document qui appuie la crédibilité du projet.

L’ancien étudiant au DESS en gestion à HEC, entrepreneur et co-fondateur de la société de consultation et d’analyse SeedingFactory, Heri Rakotomalala, explique qu’il existe quatre grandes étapes dans l’organisation d’une campagne de sociofinancement. Il est d’abord essentiel de prouver que l’on détient une bonne idée. Pour cela, il est toujours apprécié des futurs donateurs de fournir un prototype ou une vidéo de présentation du projet afin de démontrer aux contributeurs potentiels en quoi ce produit est unique. N’importe qui peut donner aux projets qu’il souhaite soutenir, aucun statut particulier n’est nécessaire. Le donateur doit seulement s’inscrire sur la plateforme sur laquelle le projet a été soumis. Vient ensuite la collaboration. Elle est essentielle dans le développement d’un réseau de partenaires. À cette étape, il est important de définir les objectifs de financement. Une bonne collaboration appelle un bon marketing ; c’est pour cela que très souvent, la plateforme de sociofinancement offre un service de conseil afin d’améliorer ses contributions et sa visibilité. Très souvent, la plateforme se réserve le droit de conseiller ou d’exiger une amélioration de la présentation du projet. Enfin, il est recommandé d’avoir de bonnes relations publiques, c’est-à-dire d’être présent sur les réseaux sociaux, les stratégies marketing étant souvent très courtes et très intenses.

Des fonds facilement

La finissante au baccalauréat en communication (médias interactifs) à l’UQAM et en charge de la communication et de la trésorerie du projet Coro, Alex Lagacé-Carter, estime que le sociofinancement est un «moyen facile de trouver du financement.» Coro est un projet d’animation inspiré de la Comedia dell’arte dans lequel les visiteurs seront transportés dans le monde visuel et sonore de Pierrot et Arlequin.

Les dons à contribution, c’est-à-dire avec la possibilité de recevoir un cadeau, rendent plus simple l’action de donner sans nécessairement avoir à se déplacer. Cependant, «c’est tout ou rien», résume l’étudiante au baccalauréat en communication (médias interactifs) à l’UQAM. Il est obligatoire d’atteindre le budget fixé pour que l’argent soit débloqué. Elle précise que le projet est très présent sur les médias sociaux. «Nous aimerions produire le meilleur projet qui soit, mais aussi laisser une relève aux projets futurs. On ne veut pas qu’ils partent de rien, soutient-elle. Le sociofinancement est un moyen de se faire connaître et d’avoir une visibilité plus humaine et plus présente.»

L’étudiante en stratégie de production culturelle et médiatique à l’UQAM, Claude Tremblay, est la directrice de production du film Sweet Sixteen. «Un court métrage qui s’inscrit dans le cadre de la production de films de fin d’études des finissants au baccalauréat en cinéma», décrit-elle. Pour l’étudiante, le sociofinancement demande un projet bien défini, avec des détails qui intéressent le public. « Il faut aussi être capable de répondre à leurs questions, reconnaît-elle. Cela demande du sérieux et des échanges concrets.»

Pour cette étudiante qui a déjà travaillé sur les enjeux économiques du sociofinancement, celui-ci est un «moyen pour du contenu non professionnel de voir le jour », admet-elle. Dans le même esprit, Heri Rakotamalala souligne que les deux choses les plus importantes dans une campagne de financement sont la passion et l’authenticité.

Lors de la conférence Eweek donnée au collège Dawson le 19 novembre dernier dans le cadre de la semaine mondiale de l’entrepreneuriat, M. Rakotomalala a défini le sociofinancement comme étant «à la fois un outil de financement et un outil marketing. » Un outil de financement, car il permet de récolter de l’argent via des dons publics, et un outil marketing, puisqu’il permet une promotion intensive auprès du public cible.

Le 5 décembre dernier s’est tenue La Ruche Académie à l’Université Laval à Québec. Les 12 meilleurs projets étudiants sélectionnés parmi une quarantaine d’autres ont donné un pitch de vente devant un jury et des partenaires de la communauté universitaire.

En vogue depuis 2008 auprès des jeunes entrepreneurs, les plateformes de sociofinancement se multiplient un peu partout au Canada et aux États- Unis. Le site protegezvous.ca recensait en avril 2012 plus de 580 plateformes de financement participatif dans le monde. Ces différents sites de sociofinancement ont lancé en 2012 quelque 1,1 M de campagnes de financement réussies. Une progression de 81 % par rapport à 2011. Au Canada, il existe 45 de ces sites, dont sept au Québec: Fundo, Haricot, La Plèbe, La Ruche, Cuban Hat, ProjetsQC et Yoyomolo. Cependant, il est impossible à l’heure actuelle de savoir combien d’étudiants utilisent ces plateformes puisqu’elles ne collectent pas de données sur le caractère des projets déposés.