Genèses du nouveau son

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Par Alexis Lapointe
mercredi 1 octobre 2014
Genèses du nouveau son
Les artistes indépendants comme Il danse avec les genoux produisent sou- vent leurs enregistrements eux-mêmes. Crédit photo: Isabelle Bergeron
Les artistes indépendants comme Il danse avec les genoux produisent sou- vent leurs enregistrements eux-mêmes. Crédit photo: Isabelle Bergeron
En pleine ébullition, la relève musicale redessine sans cesse les canaux qui assurent sa diffusion. Pour les artistes émergents, deux principaux chemins se profilent : l’indépendance ou la collaboration avec des maisons reconnues. Peu importe la voie choisie, les musiciens souhaitent demeurer maîtres de leur création.

La voie de l’indépendance

Afin de se faire entendre, s’autoproduire sans passer par une étiquette constitue souvent le premier choix qu’embrassent les musiciens.

«L’essentiel est d’être autonome et de préserver ses valeurs, lance le chanteur de la formation musicale au son rock mélodique King Karoshi et ancien étudiant au baccalauréat en économie politique à l’UdeM, Patrick Dunphy. Toute association avec l’industrie risque de compromettre son intégrité musicale, et pour bien démarrer dans la scène, il faut savoir prendre les devants et développer son style. »

Ainsi, différents groupes alternatifs choisissent un esprit d’indépendance radicale. « À notre époque, les étiquettes ont moins d’impact, croit le chanteur d’Il danse avec les genoux, Jean-Michel Coutu. Les artistes innovateurs ne cherchent souvent pas tant une maison de disques pour être reconnus qu’une bonne couverture médiatique, et à cet égard, des radios comme CISM et une multitude de médias électroniques font un travail formidable. »

Selon Jean-Michel Coutu, un nouveau mouvement émerge chez les artistes souhaitant se lancer, premier enregistrement en main. « L’essor des nouveaux groupes passe d’abord par le réseautage et les collaborations », croit-il. Celui dont la formation réinvente la musique psychédélique dans un esprit grunge travaille aussi comme réalisateur pour différents groupes comme Jésuslesfilles, Phil Console et Silver Dapple.

« La scène est particulièrement vivante aujourd’hui, indique Martin Blackburn, chanteur de Jésus les filles, qui a coréalisé leur dernier album Le grain d’or avec Jean-Michel Coutu. Il y a un éclectisme dans le son des groupes émergents, mais aussi une forte appartenance. L’entraide entre les groupes joue le même rôle que celui des maisons de disques. »

L’esprit punk du DIY ou Do It Yourself (faire soi-même) peut constituer à cet égard un défi artistique, principalement à travers une collaboration avec d’autres artistes.

Pour plusieurs musiciens d’aujourd’hui, l’investissement que nécessite l’autoproduction en vaut la peine. Jumelé à une solide organisation pour éviter les pertes financières, il permet à la création de se libérer de certains impératifs commerciaux.

Un tremplin pour l’expression

D’autres créateurs émergents voient dans leur collaboration avec une boîte de production une clé pour l’expression.

Le duo montréalais émergent Secret Sun est composé du guitariste Simon Landry et de la chanteuse Anne-Marie Campbell. Son univers musical se caractérise par des paroles poétiques, des claviers vaporeux, un aspect millésimé et une rythmique novatrice. 

Cold Coast, leur premier album, vient de paraître sur Bounsound. « Cette association est pour nous une formidable reconnaissance et le signe d’une appartenance à une communauté d’artistes de grande qualité, dit le titulaire d’une maîtrise en économie à l’UdeM Simon Landry. Les étiquettes constituent des regroupements d’artistes qui vont dans une même direction. »

À l’instar de nombreux groupes alternatifs, il croit néanmoins qu’il faut savoir s’entourer. « La clé, c’est une démarche sincère, croit-il. On a d’abord fait preuve de débrouillardise en sortant nous-mêmes notre premier EP, qui a tout de suite connu un beau succèsPuis, on a découvert cette boîte qui aime prendre des risques et respecte la démarche des artistes. Ils nous ont demandé d’entendre nos dernières compositions ; cela les a convaincus d’engager un processus pour faire paraître notre album. »

La chanteuse Ariane Brunet, qui termine un certificat de rédaction à l’UdeM, croit aussi qu’on ne peut pas fabriquer le talent. Celle dont le plus récent album, Fusée, s’est vendu à plus de 15 000 exemplaires, raconte qu’à peine âgée de 17 ans, elle avait mis en ligne ses premières chansons sur le site MySpace. Le réalisateur Toby Gendron les a repérées. « C’est lui qui m’a “startée”, relate-t-elle.Ensuite, Toby est devenu mon gérant, et m’a orientée vers les disques Victoire , qui représentent une famille à mes yeux et qui me laissent une immense liberté sur le plan de la création. »

Alors que le visage de la production musicale change,à tous égards, les musiciens de la relève – tant à travers l’autonomie que l’association à une étiquette de disque – optent pour la multiplication des initiatives.