Désordre créatif

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Par Alice Mariette
mercredi 15 octobre 2014
Désordre créatif
« Si un bureau désordonné est le signe d’un esprit désordonné, de quoi est donc l’expression d’un bureau vide ? » – Albert Einstein
Crédit photo : Isabelle Bergeron
« Si un bureau désordonné est le signe d’un esprit désordonné, de quoi est donc l’expression d’un bureau vide ? » – Albert Einstein
Crédit photo : Isabelle Bergeron
Avec la mi-session qui approche, il y a parfois plus de cernes de café sur votre bureau que d’espaces libres. Pourtant, le bazar pourrait être bénéfique à la réussite des étudiants. Des chercheurs de l’Université du Minnesota ont publié une étude l’année dernière affirmant que le désordre favorise la création et l’innovation. L’éminent physicien Albert Einstein, lui-même, ne rangeait pas son bureau.

«Le désordre dans le bureau va permettre une ouverture d’esprit, cela implique aussi un état d’être où il y a moins de rigidité », soutient le psychologue Rémi Côté. Selon lui, le fait de ne pas ranger permet d’être plus flexible, car l’individu sait plus facilement faire place à l’improvisation.

C’est aussi la conclusion de l’étude réalisée à l’Université du Minnesota. Les participants étaient invités à accomplir des tâches, soit dans un bureau parfaitement rangé, soit dans un désordre absolu. Résultat, les chercheurs ont déterminé qu’un environnement en bazar entraînait une plus grande créativité.

« Cela me fait penser à ce petit jeu,  Think outside the box , où le but est de réunir neuf points. Pour y arriver, il faut sortir du cadre et donc ne pas penser de façon conventionnelle », explique Rémi Côté. C’est pourquoi il estime que les personnes créatives sont souvent les plus désordonnées.

Gagner du temps

« Pour créer, il faut quand même être organisé : établir les différentes étapes de son projet, se donner un échéancier », observe pour sa part l’étudiante en deuxième année au baccalauréat en droit Éliane Boucher.

C’est grâce à ce fonctionnement très organisé qu’Éliane estime obtenir de très bons résultats scolaires. « On me décrit souvent comme une personne très, voire trop prévoyante, admet-elle. Je déteste me retrouver aux prises avec une situation imprévue, donc je note tout à mon agenda. »

Du son côté, le psychologue Rémi Côté croit plutôt que l’obsession de l’ordre peut créer une forme de stress bien inutile. « Accepter le désordre va induire moins d’obsession et plus de place à l’intuition », remarque le psychologue. Il estime qu’en ne perdant pas de temps avec le rangement, il est plus facile de se concentrer sur son objectif.

L’étudiante au doctorat en psychologie à l’UdeM Laurence Dumont a tendance à avoir un bureau plutôt désordonné. « Plus je me sens débordée par les tâches que j’ai à faire, plus mon bureau est désorganisé, avoue-t-elle. Je trouve superflu et déconcentrant le fait de devoir me soucier de ce qui se passe à l’extérieur de mon cerveau et de l’outil de travail avec lequel je suis directement en train d’interagir. »

La psychologue au Centre étudiant de soutien à la réussite (CÉSAR) de l’UdeM, Dania Ramirez estime toutefois que l’organisation peut aussi engendrer un gain de temps considérable. « Lorsque tout est rangé, il y a moins de risque d’oubli, soutient-elle. Imaginez un étudiant qui laisse traîner son livre quelque part sur son bureau, quand il part de chez lui pour l’université, il a de très grandes chances de ne pas penser à le prendre pour son cours. »

Pour atteindre ses objectifs scolaires, la psychologue du CÉSAR estime qu’un minimum d’ordre est requis. « La vie étudiante demande d’être structurée, et le désordre dans les affaires n’aident pas à cela, il vaut mieux éviter les bureaux en bazar pour réussir », ajoute-­t-elle.

Un bazar organisé

L’idéal serait alors d’éviter les extrêmes dans le rangement et dans le désordre. « On a tous besoin d’un minimum de bordel dans la vie, ça fait partie d’un équilibre sain », croit Éliane Boucher.

Dania Ramirez estime par exemple que toute la maison ne doit pas forcément être rangée, du moment que le bureau est organisé de façon logique. « Il n’est pas nécessaire d’être trop ordonné pour réussir, il faut être réaliste et se donner les moyens d’avoir sa propre organisation, qui va varier selon chaque individu », précise-t-elle.

Il faudrait alors trouver son propre niveau de confort, qui diffère d’un étudiant à l’autre. « Personnellement, je vis très bien dans l’ordre et dans un certain niveau de désordre », estime Laurence Dumont.

Le psychologue Rémi Côté tempère lui aussi la notion de désordre. « Il faut trouver la bonne mesure et ne pas tomber dans l’excès, sinon on risque de se perdre », affirme-t-il. L’équilibre est donc la clé du succès. Que ce soit en ordre ou en désordre, l’important est de savoir se retrouver dans son environnement.

3 astuces pour les bordéliques

1. Avoir des points de chute pour ses affaires

Ceci permet le développement d’automatismes qui peuvent faire gagner beaucoup de temps. Par exemple, avoir une boîte pour les factures, un crochet pour ses clés, un endroit spécifique pour les livres empruntés à la bibliothèque

2. Commencer par son bureau avant le reste

Pour les étudiants, l’environnement de travail est le plus important. Lorsque l’on fait le ménage, mieux vaut faire le tri sur son bureau en premier, car le reste n’est pas une priorité. Il ne faut pas ranger toute la cuisine pour finalement être trop fatigué pour s’attaquer au bureau.

3. Prévoir

Prendre le temps de réfléchir pour s’organiser est une très bonne solution pour les personnes désordonnées. Par exemple, prévoir ses repas de la semaine, déterminer à quel moment on va faire ses devoirs.

Avec la collaboration de la psychologue au Centre étudiant de soutien à la réussite (CÉSAR) de l’UdeM, Dania Ramirez.