Chéri, combien tu m’aimes ?

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Par Antoine Palangie
mercredi 9 février 2011
Chéri, combien tu m'aimes ?

Mesdames, les marchés sont très clairs : c’est massivement par vous et pour vous que la Saint- Valentin existe. On s’adressera donc en priorité au bon sens féminin pour réduire le gaspillage et les impacts engendrés par cette énième foire commerciale. Quelques éléments pour alimenter la réflexion.

Vous détestez que l’on vous dicte quand célébrer l’être aimé et que l’on confonde commerce et sentiments ? À vos yeux, fêter le 14 février est au mieux un attrape-nigaud, au pire un blasphème ? Selon les sondages effectués auprès des jeunes actifs occidentaux sur leur vision de la Saint- Valentin, vous avez alors quatre fois plus de chances d’être un homme qu’une femme : sur la moitié de personnes interrogées qui déclarent qu’elles seraient déçues si leur conjoint négligeait la fête des amoureux, 80% sont des femmes. Et la quasi-totalité des pro Saint- Valentin affirme que recevoir un cadeau ce jour-là est bien une preuve d’amour.

Du coup, les marchands se frottent les mains. Avec la fête des grands-mères ou celle des secrétaires, ils n’en sont pas au premier évènement récupéré, voire créé de toutes pièces pour nous faire sortir nos portefeuilles. Et ça marche : en 2009, les gros coeurs rouges dans les vitrines ont généré plus de 15 milliards de dollars de dépenses en Amérique du Nord – un milliard environ pour le seul Canada –, soit un peu plus de 100 dollars par consommateur concerné.

Les cadeaux de Saint-Valentin ne brillent pas précisément par leur originalité. Il est donc facile de les identifier et de quantifier l’impact de cette célébration sur leurs ventes : bonbons et chocolats, offerts par presque un(e) Valentin(e) sur deux, représentent 4 % du volume annuel de friandises (pas mal pour un seul jour sur 365) ; pour les fleurs, ce sont carrément 40 % du chiffre d’affaires de la filière – 1,7 milliard – qui se font le 14 février ; bijoux et vêtements – parmi lesquels beaucoup de sous-vêtements, évidemment – font chacun partie du panier des amoureux dans 15 % des cas, pour un total de trois milliards; suivent pêle-mêle cartes de souhaits (en repli à cause d’Internet, la Saint- Valentin arrive en second après Noël dans un marché de 900 millions), restaurants, nuits d’hôtel, places de cinéma et gadgets divers comme le coeur enregistreur (27 $ pour laisser vos mots doux en mode high-tech) ou le string en bonbons (environ 10 $, disponible en version homme et femme, déconseillé aux diabétiques comme aux cardiaques). Quoi qu’il en soit, de très bonnes affaires pour les commerçants, et surtout de précieuses ressources consommées pour des choses sans lesquelles – comme on l’a vu – il n’y aurait pas de bonheur terrestre possible.

Environ les deux tiers des achats pour la Saint-Valentin sont faits par les hommes. Pourtant, 70 % d’entre eux avouent se sentir obligés de faire un cadeau, parmi lesquels un tiers – qui a sûrement désiré garder l’anonymat – considère même ça comme une «corvée». Le sexe masculin fait donc également sa part de cette surconsommation, quoique de façon plus subie, ou moins assumée.

En gros, les femmes créent une pression mais les hommes la cautionnent. Pour une société plus durable et plus écoresponsable, que diriez-vous, Mesdames, de lâcher un peu de lest sur les démonstrations et les rituels amoureux, et vous, Messieurs, de pratiquer un peu plus la désobéissance civile ? Si vous finissez sur le canapé pour la Saint-Valentin, pensez fort à l’argent économisé et au noble geste de résistance que vous faites pour la planète. Puis demandez-vous si, finalement, vos valeurs sont bien compatibles avec celles de votre blonde.