Chercheurs et étudiants en quête de solutions

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Par Zacharie Goudreault
mercredi 7 septembre 2016
Chercheurs et étudiants en quête de solutions
Illustration : Adriane Paquin-Côté
Illustration : Adriane Paquin-Côté
Alors que l’UdeM se dit sensibilisée à la prévention de la radicalisation violente entre ses murs, des chercheurs en milieu universitaire travaillent activement à décrypter ce phénomène. L’objectif principal : déconstruire les mythes.
« C'est [...] une question de pédagogie publique ; on veut développer un discours d’amour pour contrer la haine. » Vivek Venkatesh Professeur au Département de l’éducation à l’Université Concordia

«Aucun milieu de l’éducation n’est épargné, affirme d’emblée le directeur général du Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV), Herman Deparice-Okomba. Il y a des cas de radicalisation dans les universités. »

Dans un rapport publié à la mi-août, le CPRMV recommande notamment la création d’une formation particulière offerte à l’ensemble du personnel en milieu scolaire. « Il faut que les enseignants puissent comprendre les manifestations de la radicalisation violente », croit le directeur du centre, qui reçoit régulièrement des appels de professeurs n’ayant pas les outils nécessaires afin d’agir rapidement.

Selon lui, il est aussi important de former les étudiants en contact avec les médias sociaux pour qu’ils puissent y reconnaître l’endoctrinement. M. Deparice-Okomba invite ainsi les universités à développer leur propre stratégie de mise en application des recommandations du Centre, entre autres par une formation offerte aux étudiants.

« Évidemment, l’UdeM est sensibilisée par ce rapport », soutient la porte-parole de l’Université, Geneviève O’Meara. Elle précise que le CPRMV a donné en mars dernier une formation sur le campus à différents membres du personnel, tels des psychologues et des employés aux Services aux étudiants (SAÉ). « Les premières étapes ont été entamées », ajoute Mme O’Meara. Elle souligne toutefois que l’UdeM n’a à ce jour aucune stratégie concrète dans ce dossier.

Trouver des solutions

« Il y a beaucoup d’universitaires qui connaissent mal ce dossier, ça crée beaucoup de préjugés, pense l’étudiant à la maîtrise en droit de l’UdeM Aurélien Charmillot. Je crois que la prévention passe par la sensibilisation, le respect et la formation ; il faut en apprendre plus sur son prochain au lieu, par exemple, d’ajouter des caméras. »

Alarmé par la propagation des discours haineux sur le Web, le professeur au Département de l’éducation à l’Université Concordia Vivek Venkatesh a justement décidé d’agir en créant un portail d’éducation à l’usage des médias sociaux en mai dernier. « Il s’agit de permettre à des chercheurs de différents horizons de sensibiliser les internautes à l’aide de vidéos interactives », explique M. Venkatesh. Financé par le ministère de la Sécurité publique du Canada, Project Someone comprend 11 dossiers à thème.

Le professeur précise toutefois que sa plateforme n’est pas l’œuvre d’un militant. « Je ne cherche pas des solutions pour éradiquer la radicalisation et les discours haineux, précise-t-il. C’est plutôt une question de pédagogie publique ; on veut développer un discours d’amour pour contrer la haine. » Il souligne en outre que son portail « vivant » valorise les débats constructifs. « Il faut permettre à tous les membres de notre société de s’exprimer », affirme le professeur. Selon lui, les débats sont trop souvent censurés.

Démystifier les discours

« Les étudiants universitaires pourraient faire de la sensibilisation dans les écoles », suggère l’étudiant au baccalauréat en médecine dentaire Woo Jae Kwon, lorsque questionné sur la prévention de la radicalisation violente.

Les experts consultés sont d’avis que le concept de la radicalisation demeure souvent obscur. « En ce moment, la radicalisation vise une religion spécifique, alors qu’elle a une dimension plus large », explique M. Venkatesh. Selon le professeur au Département de communication sociale et publique de l’UQAM Christian Agbobli, il faut éviter d’associer les radicaux aux musulmans, bien que ce soit le premier réflexe de beaucoup de gens. Il rappelle ainsi l’importance de déconstruire les mythes en documentant davantage cette problématique.

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