Avenues d’idées

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Par Rose Carine Henriquez
vendredi 10 février 2017
Avenues d’idées
Quelques membres de La Horde lors d'une des représentations de Siri. Crédit photo : Mathieu Gauvin.
Quelques membres de La Horde lors d'une des représentations de Siri. Crédit photo : Mathieu Gauvin.
La deuxième moitié de la saison du Centre du théâtre d’aujourd’hui (CTD’A) bat son plein et, avec elle, le projet La Horde. Quinze jeunes adultes ont été réunis en septembre dernier pour assister aux dix représentations de l’année théâtrale et réfléchir au discours générationnel qui y est mis en scène.
« J’ai voulu participer, car ça me permettait d’avoir une voix parmi tant d’autres et de me faire entendre sur ma vision de notre génération. »
Justice Rutikara, étudiant au baccalauréat en études internationales et membre de La Horde.

Les membres de La Horde se rencontrent de manière informelle avant ou après les spectacles, échangent avec les auteurs, se livrent à des exercices d’écriture et participent à la constitution d’une pensée. « Il y a vraiment le portrait d’une microsociété et c’est tout ce qu’on est de toute façon, croit le coordonnateur de l’action sociale du CTD’A, Xavier Inchauspé. On ne peut pas la réduire à une idée, cette génération-là. La première chose qu’on leur a dit quand on les a rencontrés, c’est “La Horde, ce sera ce que vous en ferez aussi”. » Pour M. Inchauspé, le projet se veut collectif et égalitaire. Quinze jeunes ont été retenus sur deux cents candidatures, en fonction de leur originalité et de leur personnalité.

« Quand j’ai fait la saison 2016-2017, j’ai rassemblé en majorité des écritures de jeunes auteurs qui faisaient des portraits que je trouvais assez troublants de la jeunesse ou des relations intergénérationnelles, dévoile le directeur artistique du CTD’A, Sylvain Bélanger. Les constats étaient souvent des autocritiques. Ça donnait un tableau d’une jeunesse assez sombre, assez en colère par rapport aux générations précédentes. » La Horde est née dans ce désir de constituer un groupe susceptible de confronter, par le biais de la parole, la réalité présentée dans les pièces. « Je voulais discuter du fossé qu’il y a entre ma perception de la jeunesse et ce qui est dans les écritures de la saison, ajoute M. Bélanger. Pour voir si la vérité n’est pas plutôt dans les nuances de gris que juste dans le blanc ou noir. » Issus de parcours totalement différents, les jeunes apportent une ouverture, une fraîcheur et une honnêteté intellectuelle selon lui.

Dialogue de générations

Que tout le monde s’exprime de façon égale, c’est le souhait des créateurs du projet. Cela rejoint les motivations des participants comme l’étudiant au baccalauréat en études internationales et membre de La Horde Justice Rutikara. « J’ai voulu participer, car ça me permettait d’avoir une voix parmi tant d’autres et de me faire entendre sur ma vision de notre génération, exprime-t-il. Il est très rare qu’on nous donne la possibilité de le faire. »

L’idée d’une écoute nécessaire traverse tous les témoignages recueillis. « Quand ils ont créé La Horde, je pense que les organisateurs voulaient écouter, affirme l’étudiant au certificat en communication et rédaction François Lavergne, également participant. On le remarque encore. Par exemple, dans l’exercice d’écriture, ils nous disent “Vous avez sûrement quelque chose à dire, écrivez-le, dites-le nous, peu importe quoi”. »

Les responsables du projet ressentent ce désir de partage avec les autres. « Ce qui les intéresse, c’est justement de rencontrer des gens qui ne sont pas comme eux, avance M. Bélanger. Ils sont vraiment dans un mode d’écoute, de découverte, de groupe privilégié alors que dans la vie, on est souvent avec nos amis, notre groupe de travail. Eux, ils reconnaissent cette richesse-là. »

La solidarité

À l’instar de la thématique qui traverse les dix pièces de la saison, La Horde suggère une visionde solidarité et de réflexion collective. « Qu’est-ce qui fait qu’on se relie ou qu’on se délie ? se demande M. Inchauspé. Qu’est-ce qui fait qu’on arrive à être un nous ? » Telles sont les questions qui occupent les discussions du groupe, dont les membres auront à imaginer de nouvelles formes de solidarité dans les rencontres futures.

Un exemple qui ressort est celui de la grève étudiante de 2012 et la question de son succès ou de son échec. C’est d’ailleurs, dans ce matériau qu’a puisé la pièce Dimanche Napalm, présentée en novembre dernier au CTD’A. « Cette année, les pièces sont toutes axées autour d’une idée de révolution, de rébellion, de constant changement, de malaise, et dans une certaine mesure en réaction avec les évènements du printemps érable », remarque l’étudiant au baccalauréat en biologie Simon Michon.

Il reste encore quelques mois à ce projet pilote qui tire trop vite à sa fin selon Sylvain Bélanger. « Vu qu’on nourrit une pensée en continu, qui est en train de se construire avec eux, j’ai vraiment l’impression d’avoir trempé un petit orteil, et on est déjà en janvier », admet-il. Cependant, Xavier Inchauspé et lui veulent continuer à faire dialoguer le théâtre et le social. Chaque saison appelle ses propres questionnements. Quant au résultat de ce premier essai, le temps apportera la réponse et également 15 portraits de société, d’après M. Bélanger.