Du travail adapté pour les jeunes en errance

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Par Edouard Ampuy
vendredi 21 juin 2019
Du travail adapté pour les jeunes en errance
TAPAJ est un programme pour jeunes de 16 à 30 ans qui propose un dépannage économique ponctuel. (Crédit photo : pixnio.com)
TAPAJ est un programme pour jeunes de 16 à 30 ans qui propose un dépannage économique ponctuel. (Crédit photo : pixnio.com)
Le programme Travail alternatif payé à la journée (TAPAJ) offre aux jeunes en situation de précarité l’occasion de travailler quelques heures par semaine et d’obtenir un premier salaire. Ce programme mise sur une approche de réduction des méfaits qui s’adapte aux besoins des jeunes et vise à les accompagner dans leur insertion sociale.

Quatre jours par semaine, le programme TAPAJ, mis en place par l’organisme Spectre de rue, accueille des groupes de cinq à huit jeunes. Chaque participant, âgé de 16 et 30 ans, est dans une situation de forte précarité, comme l’explique l’intervenant au programme Sébastien Decary. « Ce sont des gens en instabilité résidentielle avec des problèmes de toxicomanie, beaucoup sortent du centre jeunesse et ont une scolarité très faible », indique-t-il.

Pendant deux heures et demie, ils travaillent pour gagner 30 $, un premier salaire, mais il s’agit surtout d’une occasion de se mettre en action, selon l’intervenante au programme, Véronique Martel. Les tâches sont diverses et vont de l’assainissement de rues à des travaux d’horticulture. Véronique précise que la plupart de, ces jeunes n’ont aucune expérience de travail. « Ça leur fait une première expérience à mettre sur le C.V, déclare-t-elle. Ça leur permet aussi d’acquérir un peu de connaissance sur eux-mêmes, sur ce qu’ils aiment faire dans la vie, et ça leur apprend quelques petites techniques de travail. »

Une approche de réduction des méfaits

Étudiantes à l’UdeM en travail social, Camille Poirier et Roxanne Bédart sont également intervenantes au programme TAPAJ. Elles expliquent que celui-ci offre aux jeunes un accompagnement adapté et qui fait preuve de souplesse. « Ils peuvent venir se faire un peu d’argent d’une manière qui est légale, encadrée, et qui respecte leurs habitudes de consommation », illustre Camille.

Spectre de rue prêche le principe de l’approche de réduction des méfaits. L’idée est de prendre les jeunes tels qu’ils sont, sans les paternaliser ou les juger, énonce Esther Marcotte, une future étudiante en psychoéducation à l’UdeM et également intervenante. Les participants peuvent arriver sous influence aux sessions de travail, tant qu’ils sont capables d’effectuer les tâches. « On n’est pas là pour les empêcher de consommer, on est là pour les encourager à le faire de façon sécuritaire et responsable », commente-t-elle.

Le but est d’instaurer une relation de confiance entre l’intervenant et le jeune, expliquent les trois intervenantes. « On travaille vraiment avec les jeunes au coude à coude, on veut créer un lien particulier, plus informel, mais qui a beaucoup d’impact », affirme Camille.

La problématique de la main-d’œuvre

Cette année, la pénurie de main-d’œuvre qui touche le Québec amène des problématiques de recrutement pour le programme TAPAJ de Spectre de rue. Selon Sébastien Decary, beaucoup d’employeurs ont baissé leurs critères de recrutement, et les jeunes en situation de précarité ont plus de chance de trouver un emploi.

Ce constat, qui apparaît comme positif au premier abord, ne l’est pas forcément, comme le souligne Véronique Martel, pour qui ces jeunes ne sont pas prêts à travailler dans ce type d’entreprises. « Ils ont encore beaucoup de travail à faire sur eux-mêmes et sur leur routine de vie, développe-t-elle. Donc, ils décrochent l’emploi, mais ne le gardent que deux semaines et repartent à la case départ. »

Le programme TAPAJ de Spectre de rue s’organise en deux volets, qui ont pour but d’aider les jeunes à s’insérer socialement. Dans son bilan annuel 2018/2019, l’organisme annonce un total de 225 participants pour le premier volet 1, 26 pour le second, et 13 personnes qui ont fait la transition vers un emploi ou un retour aux études.

 


 

 

Le développement du programme TAPAJ

L’organisme Spectre de rue a créé le programme TAPAJ en 2000. À Montréal, les organismes Macadam Sud à Longueuil et L’Escale à Montréal Nord l’ont repris.
En 2013, le programme s’est également implanté en France, d’abord à Bordeaux, avant de se développer à l’échelle nationale. En 2017, 17 villes sont concernées parmi lesquelles Paris, Nice, Marseille, Strasbourg et Toulouse, et 21 nouvelles candidatures sont en cours d’étude.