7e art et anthropologie

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Par Patrick.Georges
mardi 12 mars 2013
7e art et anthropologie
Maurice Oviedo et Chantal Renaud organisent le festival de façon bénévole. (Photo: Dominique Cambron-Goulet)
Maurice Oviedo et Chantal Renaud organisent le festival de façon bénévole. (Photo: Dominique Cambron-Goulet)

Le 10e Festival international du film ethnographique du Québec (FIFEQ), qui se déroule du 13 au 17 mars, met à l’honneur l’anthropologie visuelle. L’événement, tenu principalement dans les universités québécoises, cherche à se distancier d’un stéréotype de l’ethnographie, soit l’Homme blanc qui débarque en Afrique pour y capter des images d’un peuple encore méconnu.

« De nos jours, on a des films ethnographiques dans lesquels les réalisateurs filment leur propre société et la communauté où ils vivent, précise la coordonnatrice générale de l’événement, Chantal Renaud. Ils ne vont plus forcément ailleurs. » Les gens veulent donc découvrir leur propre environnement, et c’est précisément le rôle que se donne le FIFEQ. 

La formule du festival est simple : le FIFEQ offre gratuitement des projections de films dans les universités de la province. Cette année, l’UdeM, l’Université McGill, l’Université Concordia et l’Université Laval présenteront une sélection de courts et de moyens métrages. Tous sont regroupés par blocs thématiques, par exemple, la mémoire, la spiritualité ou la vie rurale. À la fin de chaque séance, les participants tiennent une discussion afin de saisir la complexité des propos qu’ils ont entendus.

Bien que les projections aient lieu dans les établissements universitaires de la province, elles sont toujours ouvertes au grand public. Si les étudiants ont un rôle important à jouer dans l’organisation du FIFEQ, ce n’est pas le cas de leurs professeurs, qui en sont absents, selon Chantal Renaud. « Le festival est organisé sans la participation des professeurs, tient-elle à préciser. Le FIFEQ est vraiment une entité indépendante des universités. »

L’organisatrice souhaite dissiper les préjugés sur le cinéma ethnographique. « Il faut enlever cette idée que ce sont seulement les étudiants en anthropologie qui regardent ce genre de films », déclare-t-elle.

Même si le festival commence à se forger une réputation internationale, il continue tout de même à encourager le cinéma québécois et les films étudiants en leur accordant une place de choix.

 

Mariage entre art et science

Durant le FIFEQ, des réalisateurs provenant des quatre coins de la planète dévoilent leurs œuvres à caractère réaliste, traitant généralement d’une société en particulier ou d’une sous-culture. Certains films sont très poétiques et visuels, tandis que d’autres accordent une plus grande importance au contenu.

Toutefois, les œuvres à l’affiche ont toutes un point commun : elles laissent les gens libres de raconter leur histoire. « Ce n’est pas le réalisateur qui impose sa vision de la chose, ce sont les gens qui offrent un aperçu de leur problématique », nuance Chantal Renaud.

Certains projets proposés sont éliminés d’emblée. C’est notamment le cas des documentaires engagés. « Ces films-là ont déjà une vitrine ailleurs, estime la coordonnatrice. Le FIFEQ n’est pas leur place. »

Les films ne sont pas pour autant choisis selon leur rigueur scientifique. « Ce n’est pas une science pure, surtout pas dans le cadre de notre festival », explique Mme Renaud. Le festival représente véritablement un mélange des côtés artistiques et scientifiques de l’ethnographie, selon elle. « L’art ne biaise pas le processus scientifique, précise-t-elle. On sélectionne les films selon la façon dont ils sont abordés et selon l’accès qu’ils nous donnent à tous ces gens filmés. »

 

Un événement bien ficelé

Le FIFEQ est avant tout le fruit du travail acharné d’un groupe de bénévoles passionnés par le cinéma. En plus d’un comité central, un groupe formé principalement d’étudiants en anthropologie ou en études cinématographiques prend en charge l’organisation dans chacune des universités participantes.

Pour le coordonnateur et étudiant en urbanisme de l’UdeM, Maurice Oviedo, l’organisation d’un tel événement est tout simplement géniale. « Ce qui est magnifique, c’est que personne n’est payé, mais tout le monde arrive à donner beaucoup de soi-même et arrive à construire quelque chose d’aussi bien, s’enthousiasme-t-il. C’est ce qui me pousse à continuer. »

À l’UdeM, les membres du comité organisateur ont choisi quatre blocs thématiques – « Transmission, entre rupture et continuité », « Représenter l’insaisissable », « Migrer pour travailler » et « Réappropriation de l’espace public » – pour la représentation qui aura lieu le 16 mars 2013.

L’étudiante et membre du comité de l’Université Sara Blaser prévoit même qu’il risque d’y avoir tout un débat. « Il y a un film qui n’est composé que d’entretiens de personnes qui se sont fait arrêter durant la grève étudiante du printemps dernier. Cela peut être sujet à controverse », affirme-t-elle. 

« Le FIFEQ, c’est toujours un renouveau, déclarent les organisateurs Maurice Oviedo et Chantal Renaud. Chacun amène sa personnalité, ses champs d’intérêt, ses expériences et, selon les gens qui organisent le tout, cela donne un festival différent. » Ils ne semblent donc pas trop inquiets pour l’avenir du festival, même si l’année 2013 sera vraisemblablement leur dernière édition en tant qu’organisateurs.

 

FIFEQ à l’UdeM

16 mars

Dès 13 h