Titre Manquant

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Par Aude.Garachon
vendredi 25 février 2011
Titre Manquant

«  Que ce soit en bien ou en mal, la meilleure des femmes est celle qui fait le moins parler d’elle dehors ». C’est une Jocaste libérée que Julie Vincent met en scène et interprète dans sa nouvelle pièce à l’Espace Libre.

Une femme est allongée au sol, un foulard rouge entourant sa gorge traine sur ses flancs. Derrière elle, des images sont projetées sur le mur : des mains d’homme se posent sans arrêt sur la bouche de Jocaste. Elle essaye de les repousser, mais en vain. Les corps de Jocaste et Œdipe, corps à corps s’enlacent : funeste tango en clair obscur.

Jocaste, inspirée de la tragédie de Sophocle, donne enfin la parole à la reine de Thèbes. Cette pièce, crée par la compagnie Singulier Pluriel, prend inspiration d’un texte de l’Uruguayenne Mariana Percovich. Julie Vincent, à la fois directrice de Singulier Pluriel, co-metteure en scène, et comédienne principale, porte à bout de bras ce projet ambitieux et original.

Jocaste, la pire des femmes, haïe de Thèbes, prend la parole. Allongée, inerte sur le sol, son foulard rouge comme preuve de sa pendaison, elle reprend vie pour nous raconter son histoire.  « Œdipe a brisé mon silence » : le flot de paroles jusqu’alors brimé par les hommes se déverse sur scène.  La reine exprime sa détresse et sa douleur face à un destin qui s’abat sur elle sans qu’elle ne puisse demander grâce. Mais Jocaste, épouse de Laïos puis de son propre fils Œdipe, fait aussi part de ses désirs inassouvis et de sa quête de jouissance. En filigrane, à travers Jocaste, une question se pose : quelle place pour femme dans la société ?

Le texte de Mariana Percovitch est sublimement mis en valeur par l’interprétation de  Julie Vincent. Tantôt volcanique, tantôt empreinte d’une tristesse sans fin, la comédienne joue tous les visages de la reine de Thèbes, et incarne aussi les amants, maris, et fils.  Seule sur scène, elle prend tout l’espace.

La pièce repose uniquement sur le jeu de Julie Vincent et sur le texte de Mariana Percovich. La mise en scène est  pour ainsi dire ascétique. Des noms de chapitres rythmant la vie de Jocaste sont projetés sur le fond. Pour seuls décors, quatre tabourets chancelants. Pas de costumes non plus : Jocaste porte des talons hauts et une robe noire cintrée.

La pièce aurait pu être ennuyante si elle avait duré plus longtemps. Les cinquante minutes reste un bon timing pour savourer un texte rythmé, étonnement contemporain. À voir.

Jocaste est présenté à l’Espace Libre jusqu’au 12 mars.